J.O. 266 du 15 novembre 2002       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 18826

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Rapport sur la campagne électorale à la radio et à la télévision (adopté le 15 octobre 2002)


NOR : CSAX0206084X







Le Conseil supérieur de l'audiovisuel se voit confier, par la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, deux missions déterminantes en période électorale.

L'une vise à assurer le respect de l'expression pluraliste des candidats dans les émissions habituelles du programme des services de radio et de télévision publiques et privées pour la période des campagnes électorales. L'autre consiste à organiser la production, la programmation et la diffusion des émissions de la campagne officielle sur les antennes du service public de la radio et de la télévision.

L'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée (annexe 1) dispose en effet que : « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe les règles concernant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives aux campagnes électorales que les sociétés nationales de programme sont tenues de produire et de programmer et que la société prévue à l'article 51 de la présente loi est tenue de diffuser. Les prestations fournies à ce titre font l'objet de dispositions insérées dans les cahiers des charges.

« Pour la durée des campagnes électorales, le conseil adresse des recommandations aux exploitants des services de communication audiovisuelle autorisés en vertu de la présente loi. ».

Pour l'élection présidentielle, la compétence générale que le CSA tient de la loi du 30 septembre 1986 est renforcée par l'article 15 du décret du 8 mars 2001 portant application de la loi no 62-1299 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel (cf. note 14) (annexe 2) qui lui confie la mission de veiller au respect du principe d'égalité entre les candidats dans les programmes d'information pendant la période de campagne officielle.

Pour cette élection, le CSA exerce ses compétences en liaison avec deux autres autorités. La responsabilité institutionnelle du déroulement et du contrôle de la campagne est en effet répartie entre le Conseil constitutionnel, la Commission nationale de contrôle en vue de l'élection du Président de la République et le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Ces trois autorités sont chargées de veiller, chacune en ce qui la concerne, au bon déroulement de l'élection.

La compétence du Conseil constitutionnel est entendue très largement en ce qui concerne l'élection présidentielle. L'article 46 de l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 dispose en effet que « le Conseil constitutionnel est consulté par le gouvernement sur l'organisation des opérations de l'élection du Président de la République. Il est avisé sans délai de toute mesure prise à ce sujet ».

Le CSA a donc consulté préalablement pour avis le Conseil constitutionnel sur la recommandation et les décisions qu'il a été amené à prendre dans le cadre de la campagne en vue de l'élection du Président de la République.

De son côté, la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l'élection présidentielle est chargée de veiller, en application de l'article 13 du décret du 8 mars 2001 portant application de la loi no 62-1299 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel, au respect du principe selon lequel tous les candidats bénéficient, de la part de l'Etat, des mêmes facilités pour la campagne en vue de l'élection présidentielle. Au titre de sa compétence générale de garant de l'égalité de traitement entre les candidats, la Commission nationale de contrôle s'intéresse au respect de ce principe sur les services de radio et de télévision, même si le CSA détient bien là une compétence directe.

La Commission nationale de contrôle a souhaité associer le Conseil supérieur de l'audiovisuel à chacune des réunions qu'elle a tenues. Le conseil a été sensible au souci de la commission de le voir prendre part à ses échanges pour contribuer à la préparation de cette élection majeure.

Ainsi, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, les deux conseillers en charge du pluralisme et le directeur général ont participé aux réunions hebdomadaires de la Commission nationale de contrôle. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a tiré le plus grand profit de ces rencontres régulières et fructueuses.

Le CSA, tout comme il l'avait fait lors de la campagne en vue de l'élection du Président de la République en 1995, a donc saisi la Commission nationale de contrôle dès son installation le 22 février 2002, pour avis sur les décisions qu'il a été amené à prendre dans le cadre de l'élection du Président de la République, notamment celles qui organisent la campagne officielle radiotélévisée. La Commission nationale de contrôle a également examiné régulièrement les temps de parole accordés à chaque candidat par les médias audiovisuels et a associé le CSA à l'examen des réclamations présentées par les candidats ou les « pré-candidats », dès lors qu'elles concernaient les médias.

Le présent rapport, qui dresse le constat général du déroulement de la campagne sur les médias audiovisuels, a également pour objectif de relever les difficultés auxquelles l'instance de régulation a été confrontée et de proposer aux pouvoirs publics les réformes qui lui paraissent s'imposer.


LE RESPECT DU PLURALISME


L'intervention du Conseil supérieur de l'audiovisuel en matière d'expression pluraliste sur les services de télévision et de radio publiques et privées pendant la période de campagne électorale en vue de l'élection du Président de la République trouve un double fondement dans l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication et dans l'article 15 du décret du 8 mars 2001 portant application de la loi no 62-1299 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel.

Le second alinéa de l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée dispose que : « Pour la durée des campagnes électorales, le conseil adresse des recommandations aux exploitants des services de communication audiovisuelle autorisés en vertu de la présente loi. ».

De son côté, l'article 15 du décret du 8 mars 2001 rappelle en son premier alinéa que : « A compter de la publication au Journal officiel de la liste des candidats et jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise, le principe d'égalité entre les candidats doit être respecté dans les programmes d'information des sociétés nationales de programme et des services de communication audiovisuelle autorisés ou concédés en ce qui concerne la reproduction ou les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne. ». Le dernier alinéa de ce même article dispose enfin que : « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille au respect des dispositions du présent article et des règles et recommandations qu'il édicte en application de l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée. ».

C'est donc en application combinée de ces deux dispositions que le CSA a pris la recommandation du 23 octobre 2001 (annexe 3) (cf. note 15) qui vise à organiser l'accès des candidats aux émissions du programme et plus particulièrement celles d'information de l'ensemble des radios et des télévisions publiques et privées. Au préalable, il a saisi pour avis le Conseil constitutionnel (cf. note 16) qui n'a pas formulé d'observation sur le projet.

Le CSA a souhaité adopter cette recommandation suffisamment tôt par rapport à sa date d'application, afin que les rédactions puissent établir leurs choix éditoriaux en toute connaissance de cause.

Avant de rendre compte de l'application de la recommandation du 23 octobre 2001 (2°) et des difficultés que le CSA a rencontrées, notamment pour l'application des articles L. 49 et L. 52-2 du code électoral (3°), il importe de présenter les principes que le CSA a entendu poser (1°).


1° Les principes posés par la recommandation du CSA

du 23 octobre 2001


Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a adressé sa recommandation à l'ensemble des services de radio et de télévision. Certes, l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée précitée vise les « exploitants des services de communication audiovisuelle autorisés » et l'article 15 du décret du 8 mars 2001 précité traite des « sociétés nationales de programme et des services de communication audiovisuelle autorisés ou concédés ». Ces deux textes sont donc silencieux sur les services distribués par câble ou par satellite qui ne sont pas des services autorisés, au sens de la loi du 30 septembre 1986, mais conventionnés. Toutefois, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a considéré, comme il le fait à chaque élection, que l'obligation de respect de pluralisme inscrite à l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 lui confère une compétence globale à l'égard de l'ensemble des services de radio et de télévision.

1.1. Les principes généraux.

Dans sa recommandation du 23 octobre 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a défini les principes qui lui ont servi de grille d'analyse pour apprécier le respect du pluralisme relatif à l'élection, dans les émissions du programme des radios et des télévisions.

1.1.1. Les innovations par rapport aux précédentes recommandations.

Tirant les enseignements de la précédente campagne présidentielle et des évolutions introduites par le conseil en matière d'évaluation du pluralisme, cette recommandation a innové sur trois points principaux :

- à la différence de l'élection présidentielle de 1995, pour laquelle des textes distincts avaient été adoptés pour les services de télévision (le 20 septembre 1994) et pour les radios (le 27 septembre 1994) - avec une recommandation spécifique prise en mars 1995 pour la période de campagne officielle - la recommandation du 23 octobre 2001 concernait ces deux types de médias et l'ensemble de la période ;

- pour les interventions n'ayant pas de caractère électoral, la règle dite des « trois tiers » était remplacée par « le principe de référence » retenu par le conseil, depuis janvier 2000, pour l'accès à l'antenne des personnalités politiques, principe rappelé en préambule de la recommandation (voir 1.1.2) ;

- enfin, la recommandation du 23 octobre 2001 a précisé, pour la précampagne, d'une part, les notions de candidats « déclarés » et « présumés » et, d'autre part, la façon dont devaient être évaluées les interventions de candidats investis de fonctions officielles (cf. infra). En effet, après la publication de ses deux recommandations de septembre 1994, le conseil avait constaté que « certaines de leurs dispositions pouvaient donner lieu à des interprétations divergentes » et avait jugé nécessaire d'apporter des précisions sur ces questions, d'une part, dans un courrier interprétatif du 8 février 1995 adressé au Syndicat des radios généralistes privées, d'autre part, dans un communiqué publié le même jour. En vue de l'élection de 2002, le conseil a apporté d'emblée de telles précisions.

1.1.2. La distinction entre les propos relevant de l'actualité électorale et les autres propos.

La recommandation du CSA a opéré une distinction entre ces différents propos. Il est en effet nécessaire de les différencier, afin d'avoir une appréciation précise du pluralisme dans l'accès à l'antenne des différents acteurs politiques sur le sujet même de l'élection ;

- pour les propos ne relevant pas de l'actualité électorale, le « principe de référence » défini par le CSA, qui permet d'apprécier le respect du pluralisme pendant les périodes non électorales, a été appliqué. Ainsi, en ce qui concerne la couverture de l'actualité nationale ou internationale, les services de radio et de télévision devaient respecter un équilibre entre le temps d'intervention des membres du gouvernement, celui des personnalités appartenant à la majorité parlementaire et celui des personnalités appartenant à l'opposition parlementaire et leur assurer des conditions de programmation comparables. En outre, les éditeurs devaient veiller à assurer un temps d'intervention équitable aux personnalités appartenant à des formations politiques non représentées au Parlement ;

- pour les propos relevant de l'actualité électorale, ont été appliqués des principes distincts selon deux périodes : celle de la précampagne et celle de la campagne officielle (cf. infra).

1.1.3. La mesure des temps de parole et des temps d'antenne relevant de l'actualité électorale.

Pour chaque candidat, le conseil a relevé sur les chaînes de télévision nationales hertziennes non seulement son temps de parole, mais encore son temps d'antenne.

Le temps d'antenne globalise les différentes séquences consacrées aux candidats et à leurs soutiens : temps de présentation, de commentaire, de reportage, de reprises de citations, ainsi que le temps de parole éventuel de ces personnalités. En revanche, les éditoriaux des journalistes ne sont pas pris en compte.

Le temps de parole est extrait du temps d'antenne et récapitule la seule durée des interventions personnelles des candidats et de leurs soutiens.

Le CSA a donc disposé, d'une part, des temps de parole proprement dits de chacun des candidats et de ses soutiens, d'autre part, des temps d'antenne qui récapitulaient le temps global consacré à chacun des candidats et à ses soutiens. Ces indicateurs ont permis au conseil de publier très régulièrement sur son site Internet des relevés détaillés et de les commenter aux chaînes concernées.

1.1.4. Les candidats investis de fonctions officielles.

Le CSA a précisé le mode de comptabilisation des propos tenus par des candidats investis, par ailleurs, de fonctions officielles. Dès lors qu'une personne est considérée comme candidate, l'ensemble de ses interventions est pris en compte au titre de l'actualité électorale, à l'exception des propos tenus dans le cadre des fonctions officielles sauf, exception dans l'exception, si ces derniers contribuent à dresser le bilan de l'action passée, ou à exposer les éléments d'un programme. Cette répartition s'appliquait également aux personnes apportant leur soutien à une candidature.

La recommandation du 23 octobre 2001 a donc précisé, s'agissant des interventions de candidats déclarés ou présumés investis de fonctions officielles, que :

« Le conseil les considère comme communications à caractère électoral à l'exception des propos tenus dans le cadre de fonctions officielles. Ces derniers sont néanmoins comptabilisés au titre du candidat s'ils contribuent à dresser un bilan de l'action passée ou à exposer les éléments d'un programme.

« Cette répartition s'applique également aux personnes apportant leur soutien à une candidature. »

1.1.5. Les comptes rendus, commentaires et présentations auxquels donnent lieu l'élection.

Le CSA a également précisé que les comptes rendus, commentaires et présentations auxquels donne lieu l'élection devaient être exposés par les rédactions avec un souci constant d'équilibre et d'honnêteté. Celles-ci devaient veiller à ce que le choix des extraits des déclarations et écrits des candidats, ainsi que les commentaires auxquels ils peuvent donner lieu, n'en dénaturent pas le sens général.

1.1.6. Les trois périodes d'appréciation du pluralisme.

Pour apprécier le respect du pluralisme dans le traitement de l'actualité électorale, le CSA a distingué, au sein de sa recommandation du 23 octobre 2001, trois périodes auxquelles correspondaient des règles différentes :

- la précampagne (du 1er janvier au 4 avril, veille de l'ouverture de la campagne officielle) ;

- la campagne officielle du premier tour (du 5 au 19 avril) ;

- la campagne officielle du second tour (du 22 avril au 3 mai).

1.2. Les principes posés pour la période de précampagne.

1.2.1. Une nécessaire anticipation.

L'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose que le CSA prend ses recommandations pour « la durée des campagnes électorales ». Une telle formulation peut être entendue comme correspondant à la période de campagne officielle fixée par le décret du 8 mars 2001 (cf. note 17) . Toutefois, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a toujours choisi, quelle que soit l'élection, d'intervenir très en amont et sa recommandation s'est toujours appliquée plusieurs mois avant que la campagne ne s'ouvre officiellement. Il s'agit là de prendre en compte le traitement de l'actualité électorale par les médias qui n'attend pas la brève période de la campagne officielle. Le CSA a donc fait débuter cette période au 1er janvier 2002, soit une précampagne d'un peu plus de trois mois.

1.2.2. Le principe d'équité.

Le CSA a demandé aux services de radio et de télévision de veiller, pour la période de la précampagne (du 1er janvier au 4 avril 2002), à une présentation et à un accès équitables à l'antenne des candidats déclarés ou présumés et de ceux qui les soutiennent.

Contrairement à la notion d'égalité - en oeuvre pour la campagne officielle, mais qui ne pouvait à l'évidence s'appliquer avant celle-ci - la notion d'équité ne renvoie pas à un critère unique ou à une formule mathématique simple, mais à un faisceau d'indicateurs tels que la notoriété et le poids politique du candidat dans le paysage politique national, l'importance des forces politiques qui le soutiennent, sa contribution à l'actualité électorale, le cas échéant, sa place relative dans les sondages d'opinion, ainsi que les résultats obtenus lors des précédents scrutins.

1.2.3. La notion de « candidat ».

La notion de « candidat » n'est définie par aucun texte jusqu'à la date de publication de la liste officielle des candidats par le Conseil constitutionnel. Néanmoins, certaines personnes font part de leur intention de concourir à l'élection bien avant cette publication. Aussi, le CSA, dans sa recommandation du 23 octobre 2001, a-t-il précisé qu'il qualifierait de candidats « déclarés » ou « présumés », d'une part, les personnes ayant manifesté publiquement leur volonté de concourir à l'élection, même en l'assortissant de conditions et, notamment, en subordonnant le caractère effectif de leur candidature à l'agrément d'un parti politique et, d'autre part, toute personne qui concentrerait autour d'elle des soutiens à sa candidature.

1.2.4. La période du contrôle.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a distingué dans sa recommandation, trois catégories de programmes : les journaux télévisés ou émissions d'information quotidiennes, les magazines ou émissions spéciales d'information, les autres émissions du programme.

En ce qui concerne les journaux télévisés, le CSA a distingué trois sous-périodes pendant lesquelles l'équité devait être respectée « dans des conditions de programmation comparables » :

- le mois de janvier ;

- le mois de février ;

- du 1er mars à la veille de l'ouverture de la campagne officielle, soit le 4 avril 2002.

Pour les magazines et autres émissions d'information, l'appréciation du respect du principe d'équité a été faite sur l'ensemble de la période allant du 1er janvier 2002 à la veille de l'ouverture de la campagne officielle.

Enfin, pour les autres émissions du programme qui n'ont pas vocation à inviter systématiquement des personnalités politiques (Vivement dimanche, Combien ça coûte ?, On ne peut pas plaire à tout le monde, etc.), le CSA a considéré qu'il y avait lieu d'éviter les interventions des candidats déclarés ou présumés ou les interventions de soutien, si le principe d'équité ne pouvait être respecté.

1.3. Les principes posés pour la période de campagne officielle.

La campagne officielle comprenait deux périodes distinctes. La première s'ouvrait le 5 avril 2002 et se poursuivait jusqu'au 19 avril 2002, à minuit, pour le premier tour de scrutin. La seconde période s'ouvrait au lendemain du premier tour de scrutin, soit le 22 avril 2002, et prenait fin le 3 mai 2002 à minuit pour le second tour.

1.3.1. Le principe d'égalité.

C'est le respect de l'égal accès des candidats aux antennes qui s'imposait aux services de radio et de télévision pour la période de campagne officielle.

L'égalité d'accès de tous les candidats aux antennes des radios et des télévisions pendant la période de campagne officielle est exigée pour la seule élection présidentielle et elle est imposée, non par le CSA, mais par les dispositions réglementaires qui organisent cette élection.

L'obligation du principe d'égalité est en effet inscrite à l'article 15 du décret no 2001-213 du 8 mars 2001 portant application de la loi no 62-1299 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du président de la République au suffrage universel.

Cet article dispose que : « A compter de la publication au Journal officiel de la liste des candidats et jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise, le principe d'égalité entre les candidats doit être respecté dans les programmes d'information des sociétés nationales de programme et des services de communication audiovisuelle autorisés ou concédés en ce qui concerne la reproduction ou les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne. »

Cette égalité revêt deux formes : quantitative et qualitative.

La recommandation du 23 octobre 2001 a précisé que, pendant la campagne officielle : « Le principe d'égalité (...) implique :

« - que les temps consacrés aux candidats et à leurs soutiens soient égaux ;

« - que la présentation et les commentaires relatifs à chacune des candidatures n'en défavorisent aucune ;

« Les services veillent à ce que le choix des extraits des déclarations et écrits des candidats ainsi que les commentaires auxquels ils peuvent donner lieu n'en dénaturent pas le sens général. »

En conséquence, l'égalité devait être respectée aussi bien pour le temps de parole (moments pendant lesquels les candidats ou leurs soutiens s'expriment), que pour le temps d'antenne (durée totale des séquences consacrées aux candidats ou à leurs soutiens). En outre, le traitement éditorial (en particulier les propos tenus par les journalistes) ne devait défavoriser aucun candidat.

1.3.2. La période de contrôle.

Le CSA a repris la même distinction, en trois catégories de programmes, que pour la période de précampagne.

Pour les journaux ou émissions d'information quotidiennes, l'égalité devait se traduire par des conditions de programmation comparables :

- avant le premier tour de scrutin sur l'ensemble de la période comprise entre l'ouverture de la campagne officielle (5 avril) et le 19 avril 2002 à minuit ;

- pour le second tour de scrutin, sur chacune des semaines qui le précédait.

Pour les magazines ou émissions spéciales d'information, l'égalité devait être obtenue sur l'ensemble de la période allant de l'ouverture de la campagne officielle, le 5 avril 2002, jusqu'à la fin de la campagne en vue de l'élection présidentielle pour chacun des tours de scrutin (le 19 avril à minuit pour le premier tour et le 3 mai à minuit pour le second).

Enfin, pour les autres émissions du programme qui n'ont pas vocation à inviter systématiquement des personnalités politiques, le CSA a considéré, comme pour la période de précampagne, qu'il y avait lieu d'éviter les interventions des candidats déclarés ou présumés ou les interventions de soutien, si le principe d'égalité ne pouvait être respecté.


2° L'application de la recommandation du CSA

et les difficultés rencontrées


Le CSA dispose de deux moyens lui permettant de s'assurer du respect de sa recommandation. Il s'agit, d'une part, du suivi par ses soins des programmes et plus particulièrement du relevé des temps de parole et d'antenne des candidats et de leurs soutiens et, d'autre part, du traitement des réclamations portées devant lui. Ces deux modes de contrôle peuvent conduire le CSA a intervenir auprès des chaînes de télévision et des stations de radio pour leur demander de procéder à des rééquilibrages, ce qu'il n'a pas manqué de faire tout au long de la campagne.

De même, le CSA s'est entretenu régulièrement avec les responsables de l'information des radios et des télévisions pour préciser les conditions d'application de sa recommandation. Ainsi, il a notamment réuni le 24 octobre 2001 les directeurs de l'information des principales radios et télévisions, pour leur présenter les termes de la recommandation qu'il venait d'adopter. A nouveau, le 13 février 2002, les deux conseillers chargés du pluralisme recevaient les directeurs de l'information des principaux services de télévision afin d'expliciter les méthodes de prise en compte des temps de parole et d'antenne des candidats et de leurs soutiens.

Les conditions d'application de la recommandation, pour la période de précampagne (2.1) et pour la période de campagne officielle (2.2), seront examinées ci-après au travers de l'analyse des temps de parole et d'antenne et des réclamations.

2.1. La période de précampagne.

2.1.1. Le respect de l'équité au travers des temps de parole et d'antenne.

2.1.1.1. Le relevé des temps de parole et d'antenne : un contrôle régulier.

Le CSA établit lui-même le relevé des temps de parole et d'antenne des candidats et de leurs soutiens pour les principales chaînes hertziennes nationales (TF 1, France 2, France 3, M 6 et Canal+) ce qui permet de réduire au minimum l'écart entre la diffusion des émissions et leur visionnage. Le Conseil peut ainsi intervenir rapidement auprès des chaînes, à qui ces relevés sont régulièrement communiqués, afin qu'elles procèdent en temps utile aux rééquilibrages nécessaires.

Ainsi, le CSA a mis en place un observatoire de ces chaînes de télévision dès le 1er janvier 2002 après une phase-test qui a débuté le 15 décembre 2001. Il pouvait de la sorte vérifier au jour le jour l'application de sa recommandation. Quinze observateurs de programmes, deux correcteurs et trois analystes politiques ont été chargés du visionnage et de l'analyse d'une trentaine de journaux télévisés quotidiens de durée variable selon les chaînes et d'une quinzaine de magazines hebdomadaires diffusés par TF 1, France 2, France 3 (national), Canal+ (en clair) et M 6 (national). Des relevés de temps d'antenne et de parole des candidats et de leurs soutiens ont été établis au jour le jour et rendus publics, d'abord à un rythme mensuel, puis tous les quinze jours et enfin à un rythme hebdomadaire à compter du 1er mars 2002. Des contacts réguliers ont été établis avec des correspondants dans ces chaînes pour un suivi quasi quotidien de la comptabilisation des temps.

On trouvera en annexe le détail des relevés des temps de parole et des temps d'antenne sur les télévisions nationales hertziennes pour chacune des périodes déterminées par le CSA, accompagnés des communiqués rendus publics par le Conseil (cf. note 18) .

Par ailleurs, les responsables de programmes ne faisant pas l'objet d'une observation directe par les services du Conseil - les sociétés RFO, France 3, M 6, Radio France pour leurs programmes régionaux et locaux, les télévisions locales de métropole et d'outre-mer, les services La Cinquième, TV 5, LCI, Euronews, i-Télévision, France Inter, France Info, RTL, Europe 1, RMC Info, BFM, Radio Classique - ont adressé au Conseil tous les mois, puis toutes les quinzaines et enfin toutes les semaines, des relevés de temps de parole établis par leurs soins.

2.1.1.2. Le relevé des temps de parole et d'antenne : un bilan globalement satisfaisant mais contrasté.

Au terme de la période de précampagne allant du 1er janvier 2002 à la veille de l'ouverture de la campagne officielle pour le premier tour de l'élection présidentielle, soit le 4 avril 2002, le CSA a tiré plusieurs conclusions de la façon dont sa recommandation a été suivie d'effet par les services de télévision TF 1, France 2, France 3, Canal+ et M 6.

- le respect de l'équité dans les temps de parole :

Globalement, l'équité a été respectée de façon satisfaisante.

Cette notion d'équité a toutefois fait l'objet d'interrogations légitimes, tant de la part de certaines personnalités politiques que de certains médias. Néanmoins, à l'expérience, le Conseil supérieur de l'audiovisuel l'estime plutôt bien adaptée, surtout dans une période où le nombre et l'identité des candidats susceptibles de remplir les conditions légales pour participer à la compétition électorale sont très difficiles à évaluer. L'équité serait d'autant plus aisée à délimiter et à respecter, si la notion de candidats présumés était plus clairement circonscrite (cf. infra p. 56).

- l'anticipation d'un duel présumé au second tour :

Au cours de la précampagne, le CSA a constaté que la multiplication des candidatures présumées s'est accompagnée paradoxalement, dès lors que M. Chirac puis M. Jospin avaient officialisé leur propre candidature, de la tendance des opérateurs audiovisuels à s'inscrire prématurément dans une logique d'anticipation du second tour. Il a été ainsi accordé à ces deux candidats une place très largement prépondérante par rapport à celle de l'ensemble des autres candidats présumés, et en particulier à ceux qui paraissaient avoir une capacité non négligeable de réunir les parrainages nécessaires - logique qui, par la suite, a été démentie par le choix des électeurs.

Jugeant cette dérive incompatible avec l'esprit des institutions et avec le droit à l'information de nos concitoyens, le CSA n'a eu de cesse de demander aux chaînes et stations de radio de réduire la place relative accordée à M. Chirac et à M. Jospin et à leur soutiens. Ces appels, et les mises en garde du Conseil en ce sens, ont porté leurs fruits : alors que, au mois de février, le cumul des temps de parole de MM. Chirac et Jospin et de leurs soutiens a dépassé, parfois très sensiblement, la moitié du temps de parole des candidats dans les journaux télévisés de TF 1, France 2, France 3, Canal+ et M 6, la tendance s'est inversée en mars, et, pour la période allant du 1er mars au 4 avril inclus, les autres candidats ont bénéficié au total de 54,1 % du temps de parole dans les journaux télévisés de TF 1, de 61,4 % dans ceux de France 2, de 59,3 % dans ceux de France 3, de 68,3 % dans ceux de Canal+ et de 80,9 % dans ceux de M 6, chaîne sur laquelle le volume horaire consacré à la campagne était particulièrement faible.

- la faiblesse du temps total accordé à l'actualité électorale :

La difficulté qu'ont rencontrée des candidats présumés à bénéficier de temps d'antenne et de parole suffisants ne tient pas seulement à l'anticipation du face-à-face du second tour, ni au fait que ces candidats ont été plus nombreux que jamais. Elle a été accentuée par une tendance constatée depuis plusieurs années à la diminution de l'espace consacré à l'information et aux débats politiques sur la plupart des chaînes généralistes. Alors que, pour la précampagne de l'élection présidentielle de 1995, les cinq services de télévision hertzienne avaient consacré au total, dans leurs journaux télévisés, plus de 36 heures aux temps de parole de candidats présumés, ils n'y ont consacré qu'environ 26 heures en 2002. Ce recul est encore plus flagrant pour les magazines d'information : les temps de parole des candidats présumés y étaient de plus de 61 heures en 1995, ils sont tombés à environ 35 heures en 2002 (annexe 9).

Cette réduction des temps de parole et d'antenne est un des éléments de la difficulté des candidats à faire connaître et valoriser leurs propositions, ce qui a renforcé le sentiment, largement répandu, selon lequel l'élection de 2002 n'apportait guère d'éléments nouveaux dans le débat public.

Dans son communiqué no 481 du 5 avril 2002 (annexe 8), le Conseil supérieur de l'audiovisuel a exprimé sa préoccupation devant cette réduction de l'espace consacré au débat politique, en particulier pour le rendez-vous majeur de la vie de notre démocratie.

Ce constat global doit cependant être nuancé. Si l'on compare les deux précampagnes de 1995 et 2002, France 3 a globalement maintenu une couverture équivalente dans ses journaux télévisés et l'a doublée dans ses magazines d'information, Canal+ a connu des progressions fortes, surtout dans ses journaux télévisés. A l'inverse, les temps de parole ont diminué d'un quart dans les journaux télévisés de France 2 et de moitié dans les journaux télévisés de TF 1, de 60 % dans les magazines d'information de France 2 et de plus de 90 % dans ceux de TF 1.

2.1.2. L'examen des réclamations reçues par le conseil.

En période électorale, le traitement des réclamations représente un volet important de l'action du CSA dans sa mission de contrôle des dispositions figurant dans ses recommandations. A cet égard, la campagne en vue de l'élection du président de la République constitue une séquence privilégiée, pendant laquelle le CSA joue pleinement son rôle de médiateur entre les candidats qui font valoir leurs impératifs politiques et les médias audiovisuels qui font valoir leurs logiques éditoriales.

A l'occasion de l'élection présidentielle de 2002, le CSA a ainsi eu à traiter près d'une centaine de saisines, qu'elles émanent de candidats, de leurs mandataires ou de leurs soutiens, ou encore de simples citoyens. Il s'est attaché à les instruire dans les meilleurs délais et avec un souci constant d'impartialité.

L'accès à l'antenne :

Au cours de la période de précampagne, l'essentiel de ces réclamations a porté sur la question de l'accès à l'antenne des services de télévision et de radio et sur l'inégalité de traitement dont s'estimaient victimes un certain nombre de candidats, qu'ils soient les représentants de courants politiques significatifs ou des personnalités plus marginales.

Pour ces dernières, notamment, une meilleure exposition médiatique leur apparaissait d'autant plus déterminante qu'elle leur semblait conditionner, en termes de notoriété, leur capacité à réunir les cinq cents parrainages d'élus nécessaires pour rendre leur candidature effective.

Se fondant souvent sur les dispositions mêmes de la recommandation du CSA, ces candidats, dès lors qu'ils s'étaient publiquement déclarés, estimaient que le principe d'équité devait se traduire par un accès automatique à l'antenne, ou, du moins, par une intervention du CSA en ce sens. A titre d'exemple, on peut citer le cas de la réclamation de M. Daniel Gluckstein, en date du 19 février 2002.

Considérant que sa candidature était largement ignorée par les médias audiovisuels, M. Gluckstein a demandé au CSA d'intervenir conformément à sa recommandation auprès de leurs dirigeants pour qu'ils respectent les conditions du pluralisme à son égard.

Le CSA lui a répondu qu'après avoir examiné les temps d'antenne et de parole accordés aux candidats au cours du mois de janvier 2002 et observé qu'un certain nombre d'entre eux n'avaient bénéficié d'aucun temps d'antenne ni de parole et que d'autres avaient bénéficié de temps d'antenne et de parole insuffisants au regard du principe d'équité, il avait demandé aux chaînes nationales de télévision de veiller à mieux se conformer aux termes de sa recommandation. Le CSA a ajouté qu'il leur avait été demandé de réserver à l'ensemble des candidats une présentation et un accès à l'antenne conformes au respect du principe d'équité.

Sur ce thème, le CSA a été amené à répondre de manière similaire à des réclamations émanant d'autres candidats déclarés tels que Mme Corinne Lepage (8 février 2002), MM. Bruno Mégret (31 janvier et 12 février 2002), Pierre Larrouturou (28 février 2002), Pierre Rabhi (15 février 2002), Daniel Lacroze-Marty (10 février 2002), François Amanrich (14 février 2002), Philippe Bourre (25 février 2002) et Claude Reichman (27 février 2002).

Les demandes plus spécifiques formulées par des candidats :

Le CSA s'est également fait le relais, auprès de certaines chaînes, de demandes plus spécifiques formulées par des candidats.

Il a ainsi informé M. Jean-Philippe Allenbach, en réponse à sa réclamation en date du 20 février 2002, qu'il avait relayé oralement auprès de TF 1, France 2 et M 6 sa demande de voir sa candidature annoncée sur ces antennes.

De la même façon, en réponse à une réclamation en date du 8 mars 2002 dans laquelle elle lui faisait part de ses difficultés pour intervenir dans les éditions de 20 h de TF 1 et de France 2, le CSA a indiqué à Mme Corinne Lepage que sa demande avait été relayée auprès des opérateurs concernés.

Le CSA a également fait l'objet, le 19 février 2002, d'une saisine de M. Paul Lespagnol, mandataire de M. Robert Hue, au sujet du traitement discriminatoire réservé, selon lui, au candidat communiste par rapport à certains de ses concurrents dans les journaux télévisés du mois de janvier 2002. M. Lespagnol a demandé au CSA de rappeler aux responsables des chaînes concernées l'esprit et la lettre de sa recommandation et a exigé qu'un rattrapage lui soit accordé avant l'ouverture de la campagne officielle.

Reprenant les termes de son communiqué no 475 du 7 février 2002 (annexe 4), le CSA lui a répondu qu'il s'était fait l'écho auprès des chaînes concernées des insuffisances qu'il avait relevées au regard de l'application du principe d'équité et que, dès lors que sa situation particulière le justifiait, le cas de M. Robert Hue avait été signalé.

Plusieurs saisines ont porté sur les temps d'antenne et de parole accordés à MM. Jacques Chirac et Lionel Jospin à la suite de leur entrée en campagne. Elles ont émané de M. Jean-Pierre Chevènement à deux reprises (27 février et 16 mars 2002), de M. Robert Hue par l'intermédiaire de son mandataire (7 mars 2002) et, au nom de M. Olivier Besancenot, du secrétariat Presse de la LCR (12 mars 2002).

Dans ses réponses, le CSA a indiqué qu'ayant lui-même constaté que MM. Chirac et Jospin avaient recueilli les temps d'antenne et de parole les plus significatifs, tandis que les autres candidats avaient bénéficié d'une présence plus modeste, il avait demandé aux chaînes que l'écart entre les temps accordés à M. Chirac et à M. Jospin et l'ensemble des autres candidats soit réduit, afin que le traitement de la campagne ne s'inscrive pas à l'excès dans une logique d'anticipation du second tour.

Dans sa réponse à la deuxième saisine de M. Chevènement, le CSA a ajouté que, par respect pour les règles régissant nos institutions et pour le droit à l'information de nos concitoyens, il avait demandé instamment à tous les opérateurs de télévision et de radio de ne pas s'inscrire prématurément dans une logique d'anticipation du second tour et d'assurer, jusqu'à l'ouverture de la campagne officielle, aux candidats autres que M. Chirac et M. Jospin, un temps significativement supérieur à la moitié du temps consacré à la campagne électorale.

Le CSA a aussi été amené à se prononcer sur certaines questions ou situations particulières.

Ainsi, le 1er février 2002, M. François Bayrou, invité de l'émission Mots croisés, programmée le 4 février 2002 sur France 2, s'enquérait auprès du CSA des conséquences, en matière de temps de parole, du désistement de candidats ayant préalablement donné leur accord pour participer à cette émission.

Après avoir rappelé que le respect de l'équité entre les candidats, dans les magazines d'information, s'appréciait sur l'ensemble de la période du 1er janvier au 4 avril 2002, le CSA a précisé que, s'il devait constater des déséquilibres de temps de parole dûs au refus de certains candidats de participer à des émissions en dépit de leur accord préalable, il ne saurait en faire le reproche aux chaînes concernées. Il considérait en effet que celles-ci n'avaient pas manqué aux obligations figurant dans sa recommandation du 23 octobre 2001 mais avaient, au contraire, manifesté le souci de s'y conformer.

Les 21 et 23 janvier 2002, M. Bruno Mégret saisissait le CSA pour dénoncer le fait qu'il n'avait pas été invité à participer à trois émissions distinctes : Mots croisés et Élections 2002 sur France 2, Esprit public sur France Culture.

Le CSA lui a répondu, après avoir rappelé, là aussi, que le respect du principe d'équité dans les magazines d'information s'appréciait sur l'ensemble de la période du 1er janvier jusqu'à l'ouverture de la campagne officielle, que son absence de participation à ces émissions n'était pas exclusive d'une participation ultérieure à ces émissions, ou à d'autres relevant de la même catégorie de programmes. Le CSA ajoutait qu'il revenait en effet aux diffuseurs, dans le cadre de leur liberté éditoriale, de mettre en oeuvre le principe d'équité selon les modalités qu'ils jugeraient les plus appropriées.

M. Bruno Gollnisch, directeur de campagne de M. Jean-Marie Le Pen, a saisi le CSA, par lettres en date des 19 et 21 mars 2002, au sujet des interventions des épouses de certains candidats et, plus largement, pour s'étonner que les plus proches collaborateurs de M. Le Pen ne soient jamais, selon lui, invités sur l'antenne des médias audiovisuels.

Le CSA lui a répondu que, de manière générale, le choix des personnalités invitées à s'exprimer à l'antenne relevait de la responsabilité éditoriale exclusive des services de télévision et de radio et qu'il ne disposait d'aucune prérogative l'autorisant à faire injonction à une chaîne d'inviter telle ou telle personnalité.

S'agissant des déclarations des épouses de candidats, le CSA a indiqué qu'elles étaient retenues au titre du temps de parole des candidats concernés, dès lors que leur contenu pouvait être interprété comme un propos de soutien.

Le 14 mars 2002, M. Bernard Castagnède, directeur de campagne de Mme Christiane Taubira, a appelé l'attention du CSA sur le traitement réservé à cette candidate au cours de l'émission Quand je serai Président, diffusée le 13 mars 2002 sur France 3, pour s'étonner de la classification de Mme Taubira au rang de « petit candidat », la journaliste présentant l'émission imputant l'attribution d'un tel statut au CSA.

En réponse, le CSA s'est étonné à son tour que cette journaliste ait pu se prévaloir de l'instance de régulation pour considérer que Mme Taubira devait nécessairement se voir accorder un temps de parole inférieur à celui accordé à certains autres invités, dans la mesure où sa recommandation ne faisait nulle part référence à une hiérarchie « naturelle » des candidats ou à des catégories telles que « grands », « moyens » ou « petits » candidats.

2.1.3. Les difficultés rencontrées.

Pendant la période de précampagne, un certain nombre d'imprécisions, de difficultés et d'incertitudes - dont certaines avaient déjà été relevées lors d'élections antérieures - ont été particulièrement sensibles dans le contexte de 2002, caractérisé par une très grande dispersion des candidatures et par la conviction, très largement répandue et profondément ancrée, d'une élection ne pouvant guère apporter de surprise quant à l'issue du premier tour.

2.1.3.1. La durée de la précampagne.

Le CSA a fixé, comme pour les élections antérieures, le début de cette période au 1er janvier 2002, soit une précampagne d'un peu plus de trois mois. Cette durée recouvre inévitablement des situations diverses du point de vue des candidatures effectives : certaines personnalités annoncent leur intention d'être candidates très en amont du 1er janvier (ce fut par exemple le cas de M. Bayrou, M. Chevènement, M. Hue et M. Madelin), d'autres au milieu ou à la fin de la précampagne (cas de M. Chirac et de M. Jospin). Cette durée de trois mois, identique à celle retenue pour les élections de 1988 et 1995, s'est avérée satisfaisante à l'usage.

2.1.3.2. L'imprécision attachée à la notion de « candidat présumé ou déclaré ».

Les services audiovisuels ont rencontré des difficultés pour déterminer à quels candidats présumés ils devaient ouvrir leur antenne. La notion de « candidat » n'est en effet définie par aucun texte jusqu'à la publication de la liste officielle par le Conseil constitutionnel, intervenue en la circonstance le 4 avril 2002. Si cette absence a conduit le CSA à établir ses propres définitions des candidats « déclarés » ou « présumés », il n'a pas pour autant pu indiquer avec certitude aux services audiovisuels, parmi les très nombreuses personnes s'affirmant candidates, lesquelles entraient effectivement dans ce périmètre. C'est ainsi que, bien que les chaînes de télévision aient mentionné 32 noms de candidats présumés (soit le double des candidats figurant sur la liste établie par le Conseil constitutionnel), dont la plupart ont bénéficié d'un temps de parole même très restreint, de nombreuses autres personnalités s'affirmant candidates se sont plaintes de ne pouvoir accéder aux médias audiovisuels.

Ces imprécisions ne sauraient disparaître par le seul fait d'une définition plus stricte de la notion de candidat qu'apporteraient le CSA ou les services de télévision ou de radio. Il faudrait pour cela des modifications législatives ou réglementaires.

La qualification par le Conseil constitutionnel, le 4 avril 2002, de 16 candidats, alors que plusieurs dizaines s'étaient antérieurement fait connaître, a fait apparaître qu'à l'évidence plusieurs personnalités avaient affecté de faire acte de candidature sans même rechercher sérieusement les parrainages nécessaires à la concrétisation de leur démarche. Il s'agit d'une dérive d'autant plus préoccupante quand les élections présidentielle et législatives s'enchaînent à peu de temps d'intervalle, comme cela a été le cas en 2002. La « candidature à la candidature » à la présidentielle ainsi affichée peut, dans le cas d'espèce, n'avoir pour autre but que d'acquérir la notoriété nécessaire pour populariser un sigle politique en vue des élections législatives. La participation à ces élections permet de bénéficier tout au long de la législature des financements publics accordés en fonction du nombre de voix recueillies à ces élections. Or en ayant crédibilisé, bien malgré lui, des pré-candidatures qui se révèlent finalement être des leurres, le CSA a pu se voir accusé d'avoir facilité de véritables détournements de l'esprit des textes.

Pour pallier cette difficulté, deux solutions pourraient être envisagées. L'une, consisterait à arrêter beaucoup plus en amont du premier tour de scrutin la liste des candidats et, par voie de conséquence, à allonger la période de la campagne officielle. Si une telle solution, qui nécessiterait la modification du décret du 8 mars 2001 précité n'apparaissait pas souhaitable, une autre voie pourrait être étudiée consistant à établir des indicateurs permettant de clarifier la présomption de candidature.

Ces deux propositions sont exposées ci-après.

2.1.3.3. La prise en compte des propos de candidats investis de fonctions officielles.

L'expérience de la précampagne, comme de la campagne officielle, de 2002 montre que, malgré d'inévitables difficultés d'appréciation sur certains cas limites, il est relativement aisé de séparer les propos qui relèvent strictement des fonctions officielles occupées par certains candidats de leurs autres propos, considérés comme étant de nature électorale. Toutefois, la recommandation du 23 octobre 2001, qui établit que sont « comptabilisés au titre du candidat » les propos tenus dans le cadre de fonctions officielles « s'ils contribuent à dresser un bilan de l'action passée ou à exposer les éléments d'un programme », apparaît trop restrictive. Elle pourrait être utilement complétée par les mots : « ou s'ils apparaissent susceptibles, par leur ton ou leur contenu, de peser sur le débat électoral ».

2.1.3.4. La notion de « soutien » et l'étendue de sa prise en compte.

Si elle ne pose guère de problèmes d'interprétation en ce qui concerne les personnalités politiques, cette notion en pose davantage pour des personnalités dont la notoriété ne découle pas directement de leur engagement politique, mais qui se prononcent en faveur de tel ou tel candidat. L'attitude du conseil a consisté à ne prendre en compte, au profit des candidats, que des propos explicitement politiques tenus par ces soutiens. Cette solution ne prend pas en compte l'effet d'image lié à la présence à l'antenne de telle ou telle de ces personnalités, même quand elles tiennent des propos en apparence non liés à l'actualité électorale : c'est particulièrement flagrant dans le cas des épouses de candidats (au premier rang desquelles Mme Bernadette Chirac et Mme Sylviane Agacinski-Jospin), dont certaines interventions, dans le cadre de l'opération « pièces jaunes » pour la première sur TF 1, dans le cadre de propos philosophiques pour la seconde sur La Cinquième, n'ont pas été comptabilisées au bénéfice de leurs époux, qui en tant que candidats en tiraient pourtant à l'évidence un bénéfice indirect. S'il apparaît excessif de demander aux télévisions et aux radios d'éviter de recevoir des conjoints de candidats pour des raisons non liées à la campagne, en revanche il pourrait être envisagé à l'avenir de comptabiliser, pour les conjoints, la totalité de leur intervention comme « soutien », quel que soit le propos tenu.

2.2. La période de campagne officielle du premier tour.

L'égalité concernant l'accès à l'antenne des candidats ainsi que de leurs soutiens pour le premier tour de scrutin devait être respectée du lundi 5 avril 2002 au dimanche 19 avril 2002.

2.2.1. Le respect du principe d'égalité au travers des temps de parole et d'antenne.

2.2.1.1. Un principe ancien.

Dès la première élection du Président de la République au suffrage universel, un décret de 1964 (cf. note 19) a prévu que le principe d'égalité entre les candidats devait être respecté dans les programmes d'information des médias audiovisuels, tant publics que privés. Cette règle n'a jamais cessé d'exister. Elle figure actuellement à l'article 15 du décret du 8 mars 2001 relatif à l'élection du Président de la République qui a repris pour l'essentiel les disposions du décret de 1964.

2.2.1.2. Une application délicate à 16 candidats.

Le conseil a observé que les chaînes ont éprouvé des difficultés à respecter parallèlement les deux critères d'égalité : égalité pour le temps de parole (moments pendant lesquels les candidats ou leurs soutiens s'expriment directement), égalité pour le temps d'antenne (durée totale des séquences consacrées aux candidats ou à leurs soutiens). Le très grand nombre de candidats, d'une part, les différences d'activité de chacun d'eux dans l'animation de l'actualité électorale, d'autre part, ont sans doute aggravé ces difficultés :

- une égalité respectée pour les temps de parole mais sur des durées restreintes :

Comme le conseil l'a relevé dans son communiqué du 23 avril 2001 (cf. note 20) , rendant compte du suivi de la campagne par TF 1, France 2, France 3, Canal+ et M 6, « de manière générale, le principe d'égalité dans les temps de parole attribués aux seize candidats a été respecté de façon satisfaisante, tant dans les journaux télévisés que dans les magazines. L'exception la plus notable a concerné une candidate n'ayant pas souhaité participer à l'un des magazines ni s'y faire représenter (cf. note 21) . »

Cette égalité porte cependant sur des temps de parole parfois très restreints, sensiblement plus faibles qu'à l'élection présidentielle précédente : au total, journaux et magazines confondus, chaque candidat a bénéficié de 15 minutes environ sur TF 1, de 27 minutes sur France 2, de 7 minutes sur France 3, de 10 minutes sur Canal+ et d'à peine plus d'une minute sur M 6. Toutes chaînes confondues, chaque candidat a bénéficié d'une heure de parole au total, contre une heure et 20 minutes pour chacun des 9 candidats en lice en 1995 (annexe 9).

Cette réduction des temps de parole des candidats et de leurs soutiens - prolongeant celle qui avait été constatée au long de la précampagne - s'est, entre autres conséquences, traduite par la rareté des débats entre candidats au premier tour. Elle n'a sûrement pas facilité la capacité des candidats à faire véritablement connaître aux électeurs le contenu de leurs propositions. Elle s'explique bien sûr par la grande dispersion de l'offre politique (16 candidatures), mais aussi par l'évidente désaffection envers une campagne que nombre de commentateurs ont jugé « peu intéressante », « terne » et « très prévisible », dans la mesure où - contrairement à ce qu'il en avait été en 1995 - les observateurs comme les électeurs pensaient savoir par avance quels candidats seraient qualifiés pour le second tour.

- de fortes disparités en ce qui concerne les temps d'antenne :

Si l'égalité des temps de parole a généralement été atteinte, notamment par la programmation d'émission pré-formatées (invitations de même durée sur les plateaux), l'égalité dans les temps d'antenne n'a été approchée que de loin, et l'on a pu constater de nombreux écarts, surtout dans les journaux télévisés. Par exemple, dans les journaux télévisés de TF 1, M. Jospin et M. Chirac ont bénéficié respectivement de près de 17 minutes et de plus de 13 minutes de temps d'antenne, quand la plupart de leurs concurrents plafonnaient entre 6 et 7 minutes ; dans les journaux de France 2, les mêmes candidats ont bénéficié respectivement de 46 et de 39 minutes de temps d'antenne, la plupart de leurs concurrents n'en ayant que la moitié. Sans que les différences soient aussi accusées, d'autres candidats ont bénéficié d'un temps d'antenne relativement élevé : par exemple M. Bayrou, M. Mamère et M. Le Pen dans les journaux de France 2, Mme Laguiller, M. Mégret, M. Le Pen et M. Bayrou dans ceux de France 3.

Il est clair que les médias audiovisuels ont accordé une couverture plus soutenue aux candidats jugés les plus susceptibles d'être présents au second tour de scrutin, ainsi qu'à ceux dont le positionnement politique suscitait l'intérêt. Il faut aussi noter que les « productivités évènementielles » des candidats - si l'on qualifie ainsi leur capacité à animer l'actualité électorale et à susciter des sujets rédactionnels, par des déplacements, des déclarations, des publications, des meetings, etc. - est très inégale : les rédactions déclarent avoir eu les plus grandes difficultés à « couvrir » telle candidate absente de métropole au début de la campagne, ou tel candidat ayant tenu très peu de réunions publiques.

On trouvera, en annexe 10, le détail des relevés des temps de parole et des temps d'antenne sur les télévisions nationales hertziennes pour la période de campagne officielle du 1er tour.

2.2.2. Les réticences rencontrées dans les médias.

Il faut relever que l'application du principe d'égalité - en temps de parole comme en temps d'antenne - s'est heurtée, en permanence, à de fortes réticences des rédactions des chaînes de télévision et de radio. A chaque rencontre, à chaque contact entre le CSA et ces rédactions, celles-ci ont fait valoir qu'elles jugeaient un tel principe « anti-journalistique », « inapplicable avec 16 candidats », voire « complètement obsolète » et « d'essence bureaucratique », et même « contraire à la liberté d'expression ».

En tout état de cause, le principe de la liberté d'expression trouve ses limites en période électorale par l'obligation d'assurer le respect d'un principe essentiel, la liberté du suffrage. Le CSA a donc fait valoir aux services audiovisuels que le principe d'égalité entre les candidats, dût-il se traduire par des contraintes éditoriales, s'imposait et devait être respecté comme garant d'un bon fonctionnement démocratique.

2.3. La période de campagne officielle du second tour de scrutin.

L'égalité concernant l'accès à l'antenne des candidats ainsi que de leurs soutiens, pour le second tour de scrutin, devait être respectée sur chacune des deux semaines de la période. D'une part, du lundi 22 au dimanche 28 avril 2002 et, d'autre part, du lundi 29 avril au vendredi 3 mai 2002 à minuit.

2.3.1. Le respect du principe d'égalité sur chacune des deux semaines précédant le second tour de scrutin.

Il est à peine besoin de souligner à quel point, au lendemain d'un premier tour aux résultats inattendus, la campagne du second tour a été exceptionnelle par la dramatisation des enjeux, par le climat politique marqué notamment par des manifestations massives contre les choix incarnés par l'un des candidats, par l'appel à voter en faveur du président sortant de la part de ses adversaires traditionnels, par la tentation d'introspection apparue dans certains médias sur leurs « responsabilités » dans les résultats du premier tour, par l'engagement public sans précédent d'un très grand nombre de journaux et de journalistes à l'encontre de l'un des candidats, par le refus opposé par l'un des candidats du traditionnel débat télévisé, ainsi bien entendu que par un résultat final sans équivalent dans l'histoire politique nationale.

Cette situation électorale, à tous égards hors-normes, ne pouvait rester sans effet sur la campagne audiovisuelle sur laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a vocation à faire respecter l'égalité entre candidats. La difficulté était d'autant plus grande qu'à l'évidence chacun des protagonistes avait choisi une stratégie de communication spécifique et antagoniste de celle de son concurrent : meetings et déplacements thématiques nombreux pour M. Chirac, accompagnés de réponses parcimonieuses aux invitations à s'exprimer sur les médias ; investissement fort de M. Le Pen auprès des radios et télévisions, accompagné d'un petit nombre de conférences de presse et d'un seul meeting, organisé de surcroît la seconde semaine.

2.3.1.1. Une précision dans l'application de la recommandation.

Dans ce contexte électoral singulier, le conseil a été conduit à préciser l'application de sa recommandation.

Il a jugé conforme à l'esprit des textes dont il doit assurer l'application, et particulièrement à l'article 15 du décret du 8 mars 2001, de distinguer, dans l'application du principe d'égalité, ce qui relève des candidats eux-mêmes de ce qui relève de leurs soutiens. Cette distinction est juridiquement nécessaire par son objet qui est la désignation du chef de l'Etat. Elle est en outre pratiquement possible au second tour de scrutin, qui voit s'opposer deux candidats, alors qu'au premier tour, elle était impraticable compte tenu du grand nombre de candidats en compétition. Aussi le CSA a-t-il précisé, dans un communiqué adopté le 26 avril 2002 (annexe 11) (cf. note 22) , que :

« Chargé par le dernier alinéa du même article de veiller à l'application de ce décret et à celle de la recommandation du 23 octobre 2001 qu'il a prise en vue de la campagne pour l'élection présidentielle, le Conseil supérieur de l'audiovisuel demande à tous les opérateurs publics et privés de respecter le principe d'égalité entre les candidats, qui se traduit ainsi :

« - égalité du temps de parole de chacun des deux candidats eux-mêmes ;

« - égalité du temps de parole des soutiens de chacun des candidats. »

A la veille de la clôture de la campagne officielle, le CSA a rappelé une fois encore l'exigence posée à l'article 15 du décret du 8 mars 2001 qui impose le principe d'égalité entre les candidats (cf. note 23) .

2.3.1.2. L'égalité des temps de parole.

D'une manière générale, le CSA a relevé que le principe d'égalité a été respecté de façon globalement satisfaisante, au vu des temps de parole attribués à chacun des deux candidats, dans les journaux télévisés et, dans une moindre mesure, dans les magazines d'information (cf. note 24) . Il en a été de même pour les temps de parole attribués à leurs soutiens respectifs, conformément aux termes du communiqué du CSA du vendredi 26 avril 2002 précité.

2.3.2. L'examen des réclamations.

La période de campagne officielle du second tour n'a donné lieu, quant à elle, qu'à une seule réclamation écrite. Elle émanait de M. Bruno Gollnisch, directeur de campagne de M. Jean-Marie Le Pen, par lettre en date du 27 avril 2002, qui a appelé l'attention du CSA sur ce que M. Gollnisch estimait constituer des violations du principe d'égalité, notamment sur certaines antennes du service public, et réclamait une intervention urgente du CSA.

Le CSA a répondu à M. Gollnisch qu'il intervenait régulièrement auprès des chaînes de télévision et des stations de radio pour leur rappeler les termes de sa recommandation et qu'il remplissait scrupuleusement la mission de veiller à l'égalité entre les candidats qui lui est impartie par l'article 15 du décret du 8 mars 2001.

Le CSA lui a indiqué également que cette égalité ne serait plus respectée dans l'hypothèse où un temps de parole accordé à l'un des candidats ne pourrait pas être équilibré par la même durée accordée à l'autre et que le suivi quotidien des temps de parole de chacun des deux candidats présents au second tour de scrutin montrait que cette égalité avait été, jusque-là, respectée.

Au préalable, M. Le Pen et M. Gollnisch ont rencontré, à leur demande, dès le 24 avril 2002, le président du CSA et les deux conseillers chargés du pluralisme. Ces deux derniers ont reçu à nouveau M. Gollnisch, le 2 mai 2002, afin d'évoquer le traitement médiatique de la candidature de M. Le Pen (cf. infra).

2.3.3. Le traitement éditorial des deux candidatures.

Le conseil a dû traiter la situation liée à la très large couverture par les radios et télévisions des manifestations hostiles à M. Le Pen. Il va de soi que la relation de ces événements n'aurait pu être considérée comme relevant du temps d'antenne consacré à ce candidat (cf. note 25) .

En revanche, il n'est pas apparu possible au conseil, comme le lui ont demandé M. Le Pen et M. Gollnisch lors d'une rencontre organisée à leur demande le 24 avril 2002, puis à nouveau M. Gollnisch le 2 mai 2002, de considérer systématiquement les reportages sur ces manifestations comme autant de temps d'antenne ou de temps de parole en faveur de M. Chirac : seule l'analyse circonstanciée des propos tenus pouvait en effet permettre de les comptabiliser, le cas échéant, au profit de ce candidat.

De plus, après quelques jours où les commentaires ont été dominés par l'analyse du vote en faveur de M. Le Pen et par la relation des réactions qu'il avait suscitées, plusieurs télévisions et radios ont longuement traité des propositions du Front national et de son candidat - ce qu'elles n'avaient guère fait avant le premier tour. Force est de constater que ces analyses, généralement fondées sur des documents programmatiques accessibles au public mais n'ayant pas fait l'objet d'un examen particulier jusque-là sur des médias de grande diffusion, revêtaient le plus souvent une tonalité critique. Le conseil, qui s'était interdit d'intervenir avant le premier tour quand, par exemple, des journalistes avaient vivement critiqué les propositions fiscales de M. Chirac ou le projet « zéro SDF » de M. Jospin, a considéré qu'il ne devait pas davantage s'immiscer dans ce qui relève de la liberté éditoriale des commentateurs, dès lors que leurs analyses prennent appui sur des documents ou déclarations dont l'authenticité n'est pas discutable.

Il apparaît que, si l'égalité des temps de parole et d'antenne entre les deux candidats et entre leurs soutiens a été globalement respectée, le traitement éditorial des deux candidatures n'a pas relevé d'une égale neutralité, bien que la recommandation du 23 octobre 2001 ait réclamé dans son article II (A, 1°, c) « que la présentation et les commentaires relatifs à chacune des candidatures n'en défavorisent aucune ».

Sans doute l'absence d'un débat télévisé entre les deux protagonistes du second tour, du fait du refus opposé à cette perspective par M. Chirac dès le 23 avril 2002, a-t-il renforcé ce sentiment d'une situation politique et médiatique tout à fait inédite. On sait que l'instance de régulation de l'audiovisuel n'a jamais été à l'origine de ces « duels » télévisés, mais en a accompagné et encadré le déroulement, quand cela apparaissait nécessaire aux candidats et aux chaînes organisatrices. Dans le cas d'espèce, où l'un des candidats le réclamait et l'autre le récusait, il ne lui appartenait pas de prendre position en faveur, ou en défaveur, de l'organisation d'un tel débat.


3° Le respect des articles L. 49 et L. 52-2

du code électoral


Deux dispositions du code électoral organisent la période comprise entre le vendredi minuit précédant le scrutin et l'heure de sa clôture (20 h 00 pour les derniers bureaux de vote). Les deux articles du code électoral (L. 49 et L. 52-2) imposent un « silence médiatique » qui a pour objet de maintenir la libre expression du suffrage de chaque citoyen à l'écart de toute pression de personnes ou de circonstances. Ces dispositions du code électoral représentent un élément essentiel du droit de vote. A ces deux articles , il convient d'ajouter la réglementation relative aux sondages.

3.1. Le « silence médiatique ».

3.1.1. L'absence de propos de propagande.

Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 49 du code électoral : « A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication audiovisuelle tout message ayant le caractère de propagande électorale. »

Il en résulte notamment qu'aucune déclaration des candidats ou de ses soutiens, voire de toute personne si son propos est de propagande, ne peut être diffusée par un service de communication audiovisuelle, à compter du vendredi minuit précédant le scrutin et jusqu'à sa clôture.

3.1.2. L'absence de divulgation des résultats.

Aux termes de l'article L. 52-2 du code électoral :

« En cas d'élections générales, aucun résultat d'élection, partiel ou définitif, ne peut être communiqué au public par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle, en métropole, avant la fermeture du dernier bureau de vote sur le territoire métropolitain. Il en est de même dans les départements d'outre-mer avant la fermeture du dernier bureau de vote dans chacun des départements concernés. En cas d'élections partielles, les mêmes dispositions s'appliquent jusqu'à la fermeture du dernier bureau de vote de la circonscription territoriale intéressée. »

Ainsi, aucune information sur le dépouillement du scrutin, qu'elle concerne la métropole, les départements, territoires ou collectivités territoriales d'outre-mer, ne peut être diffusée :

- en métropole avant la fermeture du dernier des bureaux de vote, soit 20 heures précises ;

- dans les départements d'outre-mer avant la fermeture du dernier des bureaux de vote (cf. note 26) .

3.1.3. L'absence de publication et de diffusion de certains sondages d'opinion.

Dans la recommandation qu'il a adoptée le 23 octobre 2001, le CSA a rappelé aux services de radio et de télévision l'interdiction, issue de la loi du 19 juillet 1977 dans sa version applicable à l'époque, de publier des sondages pendant la semaine qui précède chaque tour de scrutin, tout en signalant les décisions récentes du juge de cassation qui semblaient enlever toute portée à cette disposition législative (cf. note 27) .

Le législateur est intervenu le 19 février 2002 pour notamment modifier l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977. Ainsi, l'interdiction de publier des sondages, qui s'appliquait pendant la semaine qui précède chaque tour de scrutin, est désormais restreinte à la veille et au jour du scrutin.

3.1.4. Un courrier du CSA adressé à tous les éditeurs.

Le 16 avril 2002, le CSA a adressé un courrier (cf. note 28) à l'ensemble des services de radio et de télévision, afin de leur rappeler à nouveau, comme il l'avait déjà fait dans sa recommandation du 23 octobre 2001, la portée des articles L. 49 et L. 52-2 du code électoral ainsi que de l'article 11 de la loi no 77-808 du 19 juillet 1977 modifiée relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion.

Le CSA a précisé aux services de radio et de télévision, s'agissant de l'article L. 52-2 du code électoral, qu'il convenait d'être vigilant quant à la communication de résultats susceptibles d'être diffusés, compte tenu des décalages horaires. Dans son courrier, il a rappelé que cet article visait deux cas :

- d'une part la diffusion avant 20 heures en métropole des résultats des territoires où le scrutin est déjà clos (Wallis et Futuna sont à + 10 heures, la Nouvelle Calédonie est à + 9 heures, la Réunion est à + 2 heures et Mayotte est à + 1 heure) ;

- d'autre part la diffusion dans les départements d'outre-mer où le scrutin n'est pas clos des résultats de la métropole où le scrutin est clos (Guadeloupe et Martinique sont à - 6 heures et la Guyane est à - 5 heures). Les services de communication audiovisuelle doivent donc attendre, pour diffuser dans un département d'outre-mer les résultats de la métropole, la fermeture du dernier bureau de vote dans ce département d'outre-mer. L'article L. 52-2 du code électoral a pour objet d'éviter que le vote des départements d'outre-mer ne soit influencé par la connaissance des premières estimations des résultats de la métropole et qu'ainsi la sincérité du scrutin n'en soit altérée.

En ce qui concerne la métropole, le CSA a demandé aux radios et aux télévisions de veiller très strictement à ne diffuser aucun résultat, ni estimation de vote avant 20 heures précises, heure de fermeture des derniers bureaux de vote en métropole.

Enfin, le CSA a également rappelé que, aux termes de l'article 11 de la loi no 77-808 du 19 juillet 1977 modifiée relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion : « La veille de chaque tour de scrutin ainsi que le jour de celui-ci sont interdits, par quelque moyen que ce soit, la publication, la diffusion et le commentaire de tout sondage tel que défini à l'article 1er. Cette interdiction est également applicable aux sondages ayant fait l'objet d'une publication, d'une diffusion ou d'un commentaire avant la veille de chaque tour de scrutin. Elle ne fait pas obstacle à la poursuite de la diffusion des publications parues ou des données mises en ligne avant cette date. »

3.2. La méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-2 du code électoral et l'altération de la sincérité du scrutin au cours de la soirée électorale du 21 avril 2002.

3.2.1. Des propos allusifs avant la clôture du scrutin du 1er tour.

Le conseil a constaté qu'au cours de la soirée électorale du 21 avril 2002 sur TF 1, France 2, France 3, Canal+, RTL, Europe 1 et RMC Info, jour du premier tour de scrutin de l'élection du président de la République, certains services de radio ou de télévision ont annoncé, de façon plus ou moins allusive, largement avant 20 h 00, heure de fermeture des bureaux de vote dans les grandes villes métropolitaines, l'identité du candidat arrivé en deuxième position. En outre, il est advenu que les premières estimations ont été données un peu avant 20 h 00.

La méconnaissance de l'article L. 52-2 du code électoral a conduit la Commission nationale de contrôle à réagir et le Conseil supérieur de l'audiovisuel à intervenir de plusieurs manières pour éviter que ces manquements ne se répètent à l'occasion du scrutin du second tour. En revanche, l'application de l'article L. 49 du code électoral et de la loi relative à la publication et à la diffusion de sondages d'opinion n'a pas soulevé de difficulté.

3.2.2. Les mesures mises en place.

3.2.2.1. Un courrier aux diffuseurs concernés.

Le conseil a adressé à ces chaînes un courrier leur demandant un respect scrupuleux des dispositions de l'article L. 52-2 du code électoral pour le second scrutin de l'élection du Président de la République, ainsi que pour les deux tours de scrutin des élections législatives qui allaient suivre.

Le CSA leur a également demandé de préciser les mesures qu'elles entendaient mettre en place pour que la loi soit respectée.

La Commission nationale de contrôle a, pour sa part, adressé un courrier au CSA le 29 avril 2002 rappelant le caractère déterminant du respect de la disposition législative inscrite à l'article du L. 52-2 du code électoral. La Commission nationale de contrôle précisait dans son courrier que cette disposition a pour objet de maintenir la libre expression du suffrage de chaque citoyen à l'écart de toute pression de personnes ou de circonstances et représente un élément essentiel du droit de vote.

3.2.2.2. Des mises en demeure à deux services de télévision Outre-mer.

Après avoir constaté la méconnaissance de l'article L. 52-2 du code électoral par la chaîne ATV (Antilles Télévision) en Martinique et par la chaîne ACG (Antenne Créole Guyane) en Guyane, qui ont diffusé sur leur antenne l'édition spéciale de TF 1 Présidentielles 2002 plusieurs heures avant la fermeture des bureaux de vote dans les deux départements d'outre-mer considérés, le Conseil a décidé de leur adresser une mise en demeure de ne pas renouveler un tel manquement (annexes 16 et 17).

3.2.2.3. Une recommandation du CSA du 30 avril 2002.

Tirant la conséquence logique du constat de ces différents manquements, le CSA a décidé, pour le second tour de scrutin du dimanche 5 mai 2002 et pour chacun des deux tours de scrutin des élections législatives des 9 et 16 juin 2002, de demander :

- à l'ensemble des stations de radio de lire à l'antenne, régulièrement et à plusieurs reprises entre 19 heures et 20 heures, le texte suivant : « Afin de maintenir la libre expression du vote de chaque citoyen, la loi interdit de diffuser tout résultat ou estimation avant 20 heures » ;

- à l'ensemble des chaînes de télévision d'annoncer à l'antenne dans un déroulant qui défilera régulièrement et à plusieurs reprises entre 19 heures et 20 heures, le texte suivant : « Afin de maintenir la libre expression du vote de chaque citoyen, la loi interdit de diffuser tout résultat ou estimation avant 20 heures ». En outre, pour que chacun puisse constater la bonne application de la loi, le CSA demande aux chaînes de télévision d'incruster à l'écran en permanence à partir de 19 h 55, heure, minutes et secondes.

Le CSA a formalisé cette demande dans une recommandation du 30 avril 2002 qu'il a adressée aux principaux services de radio et de télévision et qu'il a publiée au Journal officiel du 2 mai 2002 (annexe 18).

Dans l'ensemble, lors du second tour de scrutin du 5 mai 2002, les principaux services de radio et de télévision ont respecté les dispositions des articles L. 49 et L. 52-2 du code électoral en prévoyant un déroulant conforme à la recommandation du CSA du 30 avril 2002 (France 3, Canal+) ou une lecture à l'antenne du texte (TF 1, Europe 1, France Info), une incrustation conforme (France 3, Canal+, M 6), une simple horloge (France 2), ou un compte à rebours en minutes et secondes (TF 1) à partir de 19 h 30.


LA CAMPAGNE OFFICIELLE

RADIOTÉLÉVISÉE


L'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication confie au CSA la mission d'organiser les émissions de la campagne officielle radiotélévisée chaque fois qu'elle est prévue par le code électoral, une loi spécifique ou un décret. Ces textes en déterminent les bénéficiaires et les modalités d'attribution du temps d'émission qui leur est ainsi offert sur les antennes du secteur public.

Pour organiser les émissions de la campagne officielle radiotélévisée, c'est-à-dire pour déterminer les règles relatives au déroulement des émissions, le CSA dispose d'une large habilitation législative qui lui confère une assez grande marge de manoeuvre. Cette compétence s'exerce toutefois sous le contrôle du juge.

Dans l'exercice de sa mission, le CSA doit assurer une stricte égalité de traitement entre les candidats en présence. Ainsi, dans la mise en place des conditions de production, de diffusion et de programmation des émissions de la campagne officielle radiotélévisée, l'égalité de traitement entre les candidats qui participent au scrutin est impérative afin que la sincérité du vote ne soit pas affectée.

En ce qui concerne l'élection présidentielle, ce principe majeur est à nouveau affirmé au IV de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel et rappelé à l'article 13 du décret du 8 mars 2001 :

« Tous les candidats bénéficient de la part de l'Etat des mêmes facilités pour la campagne en vue de l'élection présidentielle. »

La mission ainsi confiée au CSA par la loi du 30 septembre 1986 modifiée est déterminante. En effet, les émissions de la campagne officielle radiotélévisée permettent à chaque candidat de s'exprimer gratuitement sur les sociétés publiques de radio et de télévision. Elles permettent notamment de donner accès à l'antenne aux candidats de moindre notoriété.

Pour assurer sa mission, le CSA est conduit à prendre un certain nombre de décisions relatives à la production, à la programmation et à la diffusion de ces émissions pour chacun des deux tours de scrutin.

Ces décisions sont de quatre ordres :

- déterminer les horaires de programmation des émissions en concertation avec les éditeurs publics ;

- fixer le nombre et la durée des émissions revenant à chaque candidat, une fois connu officiellement leur nombre ;

- décider des conditions de production des émissions ;

- établir l'ordre de passage des émissions.

Préalablement à l'adoption en assemblée plénière de chacune de ces décisions, le CSA a saisi pour avis la Commission nationale de contrôle, puis le Conseil constitutionnel. Il a, à chaque fois, tenu compte de leurs remarques.

Les émissions de la campagne officielle radiotélévisée ont été diffusées sur France 2, France 3, La Cinquième, France Inter, les stations régionales de RFO ainsi que sur RFI :

- pour le premier tour de scrutin :

- du lundi 8 au vendredi 12 avril inclus ;

- du lundi 15 au vendredi 19 avril inclus ;

- pour le second tour de scrutin : du lundi 29 avril au vendredi 3 mai 2002.


1° La durée des émissions de campagne officielle

et leur programmation sur le service public


Le décret du 8 mars 2001 prévoit à l'alinéa 2 de son article 15 que la durée totale d'émissions accordée à chaque candidat est fixée par le CSA (cf. note 29) après consultation des candidats. Par cette disposition, le décret du 8 mars 2001 constitue une avancée notable par rapport au décret du 14 mars 1964 (cf. note 30) qui organisait précédemment l'élection présidentielle.

En effet, le décret du 14 mars 1964 précité prévoyait que chaque candidat disposait de 2 heures d'émission à la télévision et de 2 heures d'émission à la radio, pour chacun des tours de scrutin. Le CSA pouvait réduire ce temps en fonction du nombre de candidats, ce qu'il ne pouvait faire que pour le seul premier tour de scrutin. Le CSA avait fait valoir dans différents rapports que ce volume était trop important et que la date à laquelle il avait connaissance de la liste officielle des candidats ne lui permettait pas de réduire le temps en fonction du nombre de candidats. La demande du CSA, sur la réduction du volume de temps accordé à chaque candidat, a donc été entendue, ce dont le conseil ne peut que se féliciter.

1.1. La durée des émissions et sa répartition en nombre et durée d'émissions.

L'article 15 du décret no 2001-213 du 8 mars 2001 prévoit que : « Chaque candidat dispose d'une durée égale d'émissions télévisées et d'émissions radiodiffusées dans les programmes des sociétés nationales de programme aux deux tours du scrutin. Cette durée est fixée par décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel après consultation de tous les candidats. Elle ne peut être inférieure à 15 minutes par candidat pour le premier tour. Pour le second tour, elle ne peut être inférieure à une heure, sauf en cas d'accord entre les deux candidats pour réduire cette durée. »

1.1.1. La durée des émissions et sa répartition en nombre et durée d'émissions pour le 1er tour de scrutin.

1.1.1.1. Une consultation préalable des candidats.

En application de l'article 15 du décret du 8 mars 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel devait donc, avant de fixer la durée totale des émissions attribuées à chaque candidat, procéder à leur consultation.

Compte tenu du délai très bref entre l'établissement de la liste officielle des candidats par le Conseil constitutionnel (le jeudi 4 avril 2002 en fin d'après-midi) et le début de la diffusion des émissions de la campagne officielle (le lundi 8 avril 2002 au matin), le CSA a souhaité procéder préalablement à une consultation informelle des candidats présumés ou déclarés. Dès le 15 février 2002, il a donc adressé à une trentaine de candidats présumés ou déclarés un courrier les informant qu'il envisageait de fixer la durée totale d'émissions dont disposerait chaque candidat aux alentours de trois quarts d'heure sur chacune des sociétés France 2, France 3, RFO et France Inter, et une durée un peu inférieure sur La Cinquième et RFI, compte tenu des particularités de leur diffusion. En effet, La Cinquième n'est diffusée sur le réseau hertzien que de 6 heures à 19 heures et la diffusion sur RFI doit tenir compte des fenêtres horaires possibles plus réduites que sur le territoire national.

Cette consultation informelle n'exonérait toutefois pas le CSA de la consultation officielle des candidats qu'il a menée le jour même de l'établissement par le Conseil constitutionnel de la liste des candidats à l'élection du Président de la République, soit le 4 avril 2002.

1.1.1.2. La durée totale d'émissions par candidat.

Prenant en compte le nombre élevé de candidats, le CSA a fixé la durée totale d'émissions pour chacun d'eux sur chacune des sociétés France 2, France 3, RFO et France Inter à 48 minutes y compris les rediffusions, à 28 minutes sur France 5 et à 8 ou 16 minutes selon les zones de diffusion sur RFI. Après avoir pris connaissance des observations des candidats à sa consultation officielle (cf. note 31) , le CSA a établi un projet de décision qui a été soumis pour avis à la Commission nationale de contrôle, puis au Conseil constitutionnel avant d'être adopté par le CSA le 5 avril 2002 (annexe 19) (cf. note 32) .

La durée fixée par le CSA était donc nettement supérieure au seuil minimal de 15 minutes fixé à l'article 15 du décret du 8 mars 2001, à l'exception de la société RFI. Pour cette dernière, en effet, le CSA a dû tenir compte des contraintes techniques particulières sur ce réseau, dues notamment à la diffusion des émissions sur plusieurs continents (cf. infra).

1.1.1.3. La répartition de la durée totale en nombre et durée d'émissions.

Tout comme il le pratique maintenant depuis un certain nombre d'élections, le CSA diversifie la durée des émissions en substituant aux traditionnelles séquences d'une durée uniforme, des émissions de différents formats qui permettent aux candidats de mieux exploiter la gamme des procédés de communication et qui sont plus à même de retenir l'attention des téléspectateurs.

Le CSA a donc réparti, pour chaque candidat, la durée totale des émissions entre :

- des émissions de « petit format » d'une durée de 1 minute 45 secondes ;

- des émissions de « grand format » d'une durée de 5 minutes ;

- une émission de 1 minute le vendredi précédant le scrutin.

Les émissions de « petit format » et de « grand format » étaient au nombre de quatre par candidat (deux la première semaine et deux la seconde semaine). Les émissions de « grand format » étaient par ailleurs rediffusées chacune une fois sur France 2, France 3, RFO et France Inter.

1.1.2. La durée des émissions et sa répartition en nombre et durée d'émissions pour le second tour de scrutin.

A la différence du premier tour de scrutin, pour lequel le conseil est seulement tenu de consulter les candidats sur la durée totale des émissions, le CSA doit, pour le second tour de scrutin, en application de l'article 15 du décret du 8 mars 2001, recueillir l'accord des deux candidats s'il veut fixer, pour chacun d'entre eux, une durée totale d'émissions inférieure à une heure.

1.1.2.1. La consultation des candidats sur la durée totale d'émissions.

Compte tenu du délai très bref entre l'établissement de la liste des deux candidats habilités à se présenter au second tour (le jeudi 25 avril) et le début de la diffusion des émissions de la campagne officielle (le lundi 29 avril), le CSA a procédé à la consultation informelle des deux candidats sur la durée totale d'émissions par un courrier du 22 avril 2002. Trois hypothèses ont été proposées :

- la première retenait une durée totale d'émissions par candidat de 50 minutes sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO, y compris les rediffusions, de 30 minutes sur France 5 et de 60 ou 30 minutes, selon les zones de diffusion, sur RFI ;

- la deuxième retenait une durée totale d'émissions par candidat de 60 minutes sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO, y compris les rediffusions, de 35 minutes sur France 5 et de 70 ou 35 minutes, selon les zones de diffusion, sur RFI ;

- la troisième retenait une durée totale d'émissions par candidat de 75 minutes sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO, y compris les rediffusions, de 45 minutes sur France 5 et de 90 minutes ou 45 minutes, selon les zones de diffusion, sur RFI.

Par un courrier du 23 avril 2002, le représentant de M. Chirac faisait savoir au CSA que, souhaitant privilégier des émissions courtes afin de mieux retenir l'attention des téléspectateurs ou des auditeurs, la première des trois hypothèses avait sa préférence.

De son côté, le représentant de M. Le Pen, par un courrier du 23 avril 2002, manifestait sa préférence pour la troisième hypothèse.

1.1.2.2. La durée totale et sa répartition en nombre et durée d'émissions.

Dès l'annonce, le 25 avril 2002, par le Conseil constitutionnel du nom des deux candidats habilités à se présenter au second tour de l'élection du Président de la République, le CSA les a consultés officiellement sur la durée globale des émissions de la campagne officielle qu'il entendait retenir pour chacun d'entre eux. Le CSA, choisissant ainsi la deuxième hypothèse sur laquelle les deux candidats avaient précédemment été consultés de manière informelle, a fixé cette durée à 60 minutes sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO, y compris les rediffusions, à 35 minutes sur France 5 et à 70 ou 35 minutes, selon les zones de diffusion, sur RFI. Le CSA, après avoir recueilli l'accord des candidats, a établi un projet de décision qui a été soumis pour avis à la Commission nationale de contrôle, puis au Conseil constitutionnel avant d'être adopté en réunion plénière le 26 avril 2002 (annexe 20) (cf. note 33) .

Cette durée se répartissait entre des émissions de « petit format » d'une durée de 2 minutes et des émissions de « grand format » d'une durée de 5 minutes. Les émissions de « petit format » et les émissions de « grand format » étaient au nombre de cinq par candidat. Les émissions de « grand format » étaient rediffusées chacune une fois sur France 2, France 3, RFO et France Inter.

1.1.3. L'ordre de passage des émissions et le résultat du tirage au sort.

Pour chacun des deux tours de scrutin, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a procédé à un tirage au sort pour déterminer les dates et ordre de passage des émissions des différents candidats.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a souhaité atténuer l'aléa du tirage au sort en retenant une « pré-grille » où étaient préplacées autant de lettres que de candidats. L'objectif était d'éviter qu'un candidat voit ses émissions de grand et de petit format diffusées un même jour et d'obtenir un équilibre des passages entre la première et la seconde semaine. Ce tirage au sort a eu lieu au siège du CSA en présence des représentants des candidats et de la presse, le vendredi 5 avril 2002, à 21 heures (annexe 21) (cf. note 34) pour le premier tour du scrutin et le vendredi 26 avril 2002 à 19 heures (annexe 22) (cf. note 35) pour le second tour.

1.2. La programmation des émissions de campagne officielle.

Le CSA a entamé avec la présidence de France Télévision une réflexion sur cette programmation dès le mois de décembre 2001 (cf. note 36) .

Cette réflexion fut conduite par le CSA avec la volonté d'optimiser l'impact de ces messages (cf. note 37) , ce qui impliquait que les émissions ne dépassent pas deux minutes pour les petits formats et six minutes pour les grands formats et que les chaînes de service public offrent des potentialités satisfaisantes d'exposition de ces messages, c'est-à-dire au moins comparables à celles qui avaient prévalu antérieurement.

Le CSA a retenu des horaires de programmation identiques pour le premier et le second tour de scrutin.

1.2.1. La grille et les horaires de programmation sur France Télévision.

Le CSA a retenu (cf. note 38) pour France Télévision la grille suivante :

France 2 :

Emission de « petit format », avant le journal télévisé de 20 heures.

Emission de « grand format », après Télématin.

Rediffusion du « grand format », vers 13 h 40, juste après la météo.

France 3 :

Emission de « petit format », avant Questions pour un champion.

Emission de « grand format », avant le 12-14.

Rediffusion du « grand format », juste après Soir 3.

La Cinquième :

Emission de « petit format », à 18 h 50, après C dans l'air.

Emission de « grand format », à 6 h 45, avant Ecomatin.

Comme pour les précédentes campagnes électorales, l'expression « juste avant » ou « juste après » doit être comprise comme sans insertion d'écrans publicitaires ou promotionnels.

Afin de toucher des publics divers et nombreux, la grille de programmation qui a été retenue par le CSA pour la société France Télévision (France 2, France 3, La Cinquième) offrait ainsi la possibilité de bien exposer les émissions, c'est-à-dire de les répartir sur l'ensemble de la journée en ne laissant aucune plage horaire à l'écart (6 h 45, 8 h 30, juste avant midi, 13 h 40, 18 h 20, 18 h 50, avant le 20 heures, après le Soir 3, vers 22 h 30). Le téléspectateur avait ainsi huit occasions par jour de regarder la campagne.

Le conseil s'est également félicité de constater qu'il n'y avait pas de divergence d'interprétation entre lui et France Télévision sur la nécessité de diffuser la campagne électorale officielle sur La Cinquième, bien que le cahier des missions et des charges de celle-ci ne l'ait pas encore prévu. La programmation quotidienne de La Cinquième sur le hertzien s'arrêtant à 19 heures, celle-ci n'a pas à assurer les mêmes rediffusions que France 2 et France 3.

Chaque candidat a bénéficié sur France 2, France 3 et La Cinquième :

- pour le premier tour de scrutin, de 35 passages (13 sur France 2, 13 sur France 3 et 9 sur La Cinquième), représentant au total 48 minutes de temps d'antenne sur France 2, 48 minutes sur France 3 et 28 minutes sur La Cinquième ;

- pour le second tour de scrutin, de 40 passages (15 sur France 2, 15 sur France 3 et 10 sur La Cinquième), représentant au total 60 minutes de temps d'antenne sur France 2, 60 minutes sur France 3 et 35 minutes sur La Cinquième.

1.2.2. La grille et les horaires de programmation sur France Inter.

Trois horaires de programmation ont été retenus. Les émissions de « petit format » ont été programmées avant le bulletin d'information de 14 heures. Les émissions de « grand format » ont été programmées après le journal de 20 heures et les bulletins de service qui l'accompagnent et rediffusées le lendemain vers 1 h 30, après l'émission Allô Macha (sauf le dernier jour pour respecter l'article L. 49 du code électoral).

Chaque candidat a bénéficié sur France Inter :

- pour le premier tour de scrutin, de 13 passages représentant au total 48 minutes de temps d'antenne ;

- pour le second tour de scrutin, de 15 passages, représentant au total 60 minutes de temps d'antenne.

1.2.3. La grille et les horaires de programmation sur RFO.

Le conseil a également retenu trois horaires de diffusion en télévision.

Chaque candidat a bénéficié sur chacune des 9 stations régionales de RFO :

- pour le premier tour de scrutin, de 13 passages représentant un volume de 48 minutes de temps d'antenne ;

- pour le second tour de scrutin, de 15 passages représentant au total 60 minutes de temps d'antenne.

Il en a été de même au sein du programme radiophonique propre de RFO, pour lequel le CSA a retenu trois horaires de diffusion.

1.2.4. La grille et les horaires de programmation sur RFI.

Les horaires de programmation sur RFI ont été retenus en tenant compte des contraintes techniques particulières sur ce réseau, dues notamment à la diffusion des émissions sur plusieurs continents.

Ainsi, tout comme en 1995, cette société, pour des raisons techniques, n'était pas en mesure de diffuser l'intégralité des émissions de la campagne officielle radiotélévisée. La disponibilité des fréquences en ondes courtes n'est pas continue et ne permet donc pas la diffusion de la totalité des émissions. La propagation des ondes courtes varie en effet tout au long de la journée et de la nuit, en fonction de l'éclairement solaire, et implique des ajustements incessants de la fréquence pour obtenir une réception optimale.

Il est donc apparu impossible de retenir un créneau horaire pour chaque zone. Le CSA n'a pas souhaité non plus retenir une multiplication des heures de transmission qui comporte des risques trop élevés d'incidents techniques (coupures sur l'acheminement, incidents de diffusion).

Chaque candidat a bénéficié sur RFI :

- pour le premier tour de scrutin, de 16 ou de 8 minutes selon les zones ;

- pour le second tour de scrutin, de 70 minutes ou de 35 minutes selon les zones.

Ce sont au total 208 émissions qui ont été diffusées sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO dans le cadre de la campagne officielle radiotélévisée du premier tour de scrutin. Compte tenu des contraintes de programmation de La Cinquième, dont la diffusion prend fin à 19 h, la rediffusion des émissions de « grand format » n'avait pas lieu sur cette chaîne, ce sont donc seulement 144 émissions qui y ont été diffusées.

Au second tour de scrutin ce sont 30 émissions qui ont été diffusées sur chacune des sociétés France 2, France 3, France Inter et RFO dans le cadre de la campagne officielle radiotélévisée. Compte tenu des contraintes de programmation de La Cinquième, dont la diffusion prend fin à 19 h, la rediffusion des émissions de « grand format » n'avait pas lieu sur cette chaîne, où seulement 20 émissions ont été programmées.

Le CSA mesure parfaitement l'effort ainsi demandé au secteur public, mais cet effort lui parait conforme aux missions du service public de la télévision nationale pour une consultation électorale majeure.


2° La production des émissions

de la campagne officielle radiotélévisée


L'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée dispose que le Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe les règles concernant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives aux campagnes électorales que les sociétés nationales de programme sont tenues de produire et de programmer. Le CSA entend cet article comme lui conférant un rôle de producteur des émissions de la campagne officielle radiotélévisée, dont il confie la production exécutive, sous son entier contrôle, à un prestataire extérieur.

Pour la production (enregistrement et montage) des émissions de la campagne officielle en vue de l'élection du Président de la République, le CSA, au lieu de retenir par principe la Société française de production (SFP), comme lors des précédentes campagnes électorales, a décidé de mettre en concurrence plusieurs prestataires techniques. Il a ainsi sollicité la société Euromédia (ex-Société française de production), la société France 3, la société Vidéo communication France (VCF) et la société Visual TV, sur la base d'un cahier des charges qu'il avait établi préalablement.

Après avoir examiné la proposition du CSA, la société VCF a informé le conseil qu'elle préférait mettre les personnels et moyens techniques dont elle dispose à l'appui de ceux de la société France 3. De son côté, la société Visual TV a informé le CSA qu'elle rejoignait l'offre portée par France 3.

Après un examen approfondi des différentes propositions, la société France 3 a été retenue pour assurer la mise en oeuvre des campagnes officielles radiotélévisées (cf. note 39) .

La société Cristal communications avait été préalablement retenue pour la coordination des opérations pour le compte et sous le contrôle du CSA.

2.1. Les conditions de production.

Afin d'assurer l'égalité de traitement entre les candidats, les émissions sont enregistrées et montées selon deux modalités possibles au choix du candidat, soit dans des studios et locaux spécialement aménagés à cet effet, soit en tournages extérieurs. Les candidats disposent des mêmes délais d'enregistrement, du même nombre de caméras, des mêmes studios et de conditions de montage identiques. Le CSA, présent sur place, veille tout au long de la campagne aux bonnes conditions d'enregistrement, de production et de diffusion des émissions.

La modernisation des instruments de production (cf. note 40) , entreprise par le CSA il y a plusieurs années, a bien sûr été maintenue afin de rendre les émissions attrayantes. Les conditions de production des émissions ont été arrêtées par le CSA dans une décision du 12 mars 2002 (annexe 23) (cf. note 41) pour le premier tour de scrutin et dans une décision du 23 avril 2002 (annexe 24) (cf. note 42) pour le second tour. Cette dernière différait peu de la première.

2.1.1. Les éléments de contenu.

Le titre II des décisions du CSA des 12 mars 2002 et 23 avril 2002 avait pour objet d'encadrer le contenu des émissions.

Le principe est certes celui de la liberté du message, mais il s'agit de rappeler les règles en vigueur qui sont communes à toutes les élections. Les décisions rappelaient donc que les intervenants ne peuvent :

- mettre en péril l'ordre public ou la sécurité des personnes et des biens ;

- tenir des propos portant atteinte à la dignité de la personne humaine, à l'honneur et à la considération d'autrui ;

- recourir à tout moyen d'expression ayant pour effet de tourner en dérision d'autres candidats ou leurs représentants ;

- porter atteinte aux secrets protégés par la loi ;

- tenir des propos à caractère publicitaire (au sens de la réglementation sur la publicité et le parrainage) ;

- porter à la connaissance du public, en application de l'article L. 50-1 du code électoral, aucun numéro d'appel téléphonique ou télématique gratuit.

Le CSA a précisé la notion d'utilisation personnelle de son temps par le candidat, qui figure au 3e alinéa de l'article 15 du décret du 8 mars 2001 et qui dispose que : « Les temps d'émission télévisée et radiodiffusée sont utilisés personnellement par les candidats. Des personnes désignées par chaque candidat peuvent participer à ces émissions. »

Il a estimé qu'il résultait de cette disposition que le candidat doit s'exprimer personnellement pendant une partie au moins de chacune des émissions. La présence du candidat devait être visuelle et vocale dans chacune des émissions télévisées, vocale dans chacune des émissions radiophoniques.

Enfin, il a tenu compte des réponses que la Commission nationale de contrôle avait apportées aux interrogations qu'il avait formulées lors de la précédente élection présidentielle, dans un courrier du 16 mars 1995. C'est ainsi qu'il a repris l'interdiction de procéder dans les émissions de la campagne officielle à des appels de fonds et d'utiliser des documents visuels ou sonores faisant apparaître des personnalités de la vie publique française sans l'accord écrit desdites personnalités ou de leurs ayants droit.

Le CSA a toutefois souhaité alléger certaines des contraintes qui figuraient dans ses décisions précédentes.

2.1.2. Le souci d'allégement des contraintes.

Trois d'entre elles ont été concernées par cet assouplissement.

- les lieux et bâtiments officiels :

Le CSA a souhaité revoir la formulation qui figurait dans ses décisions antérieures, excessive dans sa généralité, en permettant qu'apparaissent dans les émissions l'extérieur de lieux et bâtiments officiels. Une énumération des lieux et bâtiments considérés par le CSA comme officiels (cf. note 43) a été proposée dans un souci de clarification. Ainsi, l'apparition d'une école ou d'une perception, par exemple, n'a plus lieu d'être interdite dans les messages des candidats. De plus, seule l'interdiction de filmer à l'intérieur des bâtiments énumérés a été maintenue, compte tenu de l'avantage qui serait alors procuré aux candidats qui exercent une fonction officielle. Cette restriction vise à empêcher toute appropriation de symboles officiels par un candidat. Elle permet l'application du principe de neutralité de l'Etat à l'égard des candidats, corollaire du principe d'égalité.

- la combinaison des trois couleurs bleu, blanc, rouge :

Le CSA n'a pas souhaité maintenir l'interdiction de faire figurer dans les émissions de la campagne officielle radiotélévisée la combinaison des trois couleurs bleu, blanc, rouge. Une telle interdiction posée à l'article R. 27 du code électoral et qui concerne les affiches ayant un but ou un caractère électoral se transpose mal à la matière audiovisuelle. L'expérience a témoigné des réelles difficultés pratiques d'application que le CSA a pu rencontrer et qui l'ont bien souvent conduit à prendre des décisions purement formelles (par exemple, demande de recolorisation d'images d'actualités). Il n'est pas apparu au CSA, compte tenu du maintien de l'interdiction de faire apparaître dans les émissions le drapeau national, que la levée de cette restriction sur la combinaison des trois couleurs rencontrait un obstacle au regard du principe d'égalité entre candidats.

- l'usage des drapeaux :

La décision du CSA du 12 mars 2002 relative aux conditions de production des émissions de la campagne officielle radiotélévisée pour le premier tour de scrutin interdisait l'usage des drapeaux. L'application de cette disposition a toutefois soulevé des difficultés pratiques, et le CSA a souhaité, dans sa décision du 23 avril 2002 relative à la production des émissions pour le second tour de scrutin, modifier sa rédaction pour retenir comme seule interdiction l'usage de l'emblème national et de l'emblème européen (cf. infra).

2.1.3. Les moyens de production.

Tout comme par le passé, les candidats pouvaient composer leurs émissions à partir :

- d'éléments tournés en extérieur ;

- d'éléments tournés en studio ;

- d'éléments fabriqués à l'aide d'une station infographique, mise à la disposition des candidats par le CSA, permettant des effets spéciaux ;

- d'éléments vidéographiques (cf. note 44) réalisés par leurs soins et à leurs frais et dont le coût doit être intégré dans les comptes de campagne.

2.2. La mise en oeuvre de la production.

Le CSA est présent à chaque étape de la fabrication des émissions, enregistrement et montage, dont il contrôle la conformité aux conditions de production qu'il a établies préalablement.

Le contrôle porte essentiellement sur le respect des durées d'enregistrement et de montage des émissions ainsi que sur le respect des éléments du contenu. Le CSA assure également le suivi du sous-titrage à l'intention des sourds et malentendants et du montage de la bande antenne. In fine, le conseil signe le bon à diffuser.

2.2.1. Les enregistrements.

Cent trente personnes ont été mobilisées sous la direction de France 3 Production pour assurer la production exécutive des émissions, la société Radio France mettant à disposition, pendant la durée de la campagne, les studios et bureaux nécessaires. Neuf personnes ont assuré, sous la direction de M. Lucien Bergamo pour la société Cristal communications, la coordination de l'ensemble des opérations de production.

La production des émissions nécessite un important travail de collaboration et d'explication avec les représentants des candidats, à la fois pour établir le calendrier des opérations de production et pour expliciter les conditions pratiques des dispositions de la décision. Ce dialogue est particulièrement utile au bon déroulement des opérations dans des conditions d'égalité pour tous les candidats. Il pourrait être beaucoup plus fructueux si le délai entre l'établissement de la liste des candidats par le Conseil constitutionnel et le début de la diffusion de la campagne officielle n'était pas inférieur à quatre jours.

La réalisation des émissions de la campagne officielle du premier tour s'est déroulée du jeudi 4 avril au jeudi 18 avril et du vendredi 26 avril au jeudi 3 mai pour le second tour. Ce sont au total 124 émissions différentes qui ont été produites pour le premier tour de scrutin et 17 pour le second tour.

Au premier tour de scrutin, chaque candidat devait en effet produire 9 émissions. Pour seize candidats, c'est un total de 144 émissions au premier tour de scrutin qui auraient dû être produites. Certains candidats ont toutefois choisi de rediffuser ou de remonter certaines d'entre elles. Ainsi le nombre d'émissions effectivement produites au premier tour de scrutin ne s'est élevé qu'à 124.

Au second tour de scrutin, chacun des deux candidats devait produire 10 émissions. L'un d'eux a toutefois choisi de rediffuser certaines d'entre elles. Ainsi le nombre d'émissions effectivement produites au second tour de scrutin s'est élevé à 17.

Les tournages extérieurs, réalisés avec les moyens mis à disposition par le CSA, ont été relativement plus utilisés par les candidats qu'à l'occasion d'autres campagnes (cf. note 45) . Dix candidats (cf. note 46) sur les seize en lice ont choisi d'utiliser la possibilité de procéder à des tournages en extérieur que leur proposait le CSA. C'est un total de 29 tournages en extérieur qui ont été effectués pour le premier tour de scrutin. Aucun tournage en extérieur n'a été effectué dans le cadre de la préparation des émissions en vue du second tour de scrutin.

Les stations infographiques permettant la réalisation d'effets spéciaux ont été utilisées 27 fois durant les deux tours de scrutin.

En ce qui concerne les enregistrements radio, les candidats avaient la possibilité de réaliser une intervention spécialement destinée à la radio ou de réutiliser la bande sonore de l'intervention télévisée. Comme cela est régulièrement le cas, les candidats ont privilégié la seconde option, alors même que le média radio justifierait des enregistrements spécifiques.

Le CSA est convaincu que, si les délais de production étaient moins contraints, les candidats pourraient mieux utiliser les différents médias en fonction de leur qualité propre.

Comme il le fait maintenant depuis un certain nombre d'élections, le CSA s'est préoccupé de l'accès aux émissions de la campagne officielle radiotélévisée des personnes sourdes et malentendantes. Depuis la campagne officielle des élections législatives de 1993, l'ensemble des émissions de la campagne officielle radiotélévisée diffusées sur France 3 est sous-titrée (cf. note 47) . Les candidats avaient la possibilité de choisir entre le langage gestuel en association ou en substitution du sous-titrage. C'est le seul sous-titrage qu'ils ont tous utilisés.

Les enregistrements se sont déroulés sous la surveillance constante d'un ou de deux membres du CSA assistés en permanence de collaborateurs du conseil. Le président du CSA a tenu à accueillir personnellement chacun des candidats pour sa première séance d'enregistrement.

2.2.2. L'interprétation de l'interdiction de l'usage de drapeaux.

Le CSA a été confronté à une difficulté d'application de sa décision du 12 mars 2002 qui concernait l'interdiction de « [..] faire usage d'aucun drapeau » dans les émissions. Cette disposition a limité à l'excès les possibilités offertes aux candidats d'illustrer leurs propos.

En effet, dans le cadre de leurs émissions de la campagne officielle, certains candidats reprenaient des images de manifestations ou de réunions publiques dans lesquelles apparaissaient des drapeaux de syndicats (par exemple CGT, SUD-PTT, UNI, etc.), des drapeaux du parti dont ils se réclament (drapeau rouge avec l'inscription LCR), des drapeaux idéologiques (par exemple le drapeau rouge). L'application stricte de la disposition « aucun drapeau » aurait dû conduire naturellement le CSA à leur demander de les masquer à l'image.

Le conseil a préféré retenir une application pragmatique de l'interdiction, en tolérant la présence des drapeaux de syndicats et d'associations (par exemple UNI, CGT) et des drapeaux de partis (drapeau rouge avec inscription LCR), même s'il ne s'agissait pas d'images d'archives ou de présences furtives et marginales de drapeaux. Cela a permis d'éviter les débats et différences d'appréciation que n'auraient pas manqué de susciter les notions « d'archives » et de « furtive et marginale ».

Le CSA a donc maintenu, au 1er tour, l'interdiction de la présence des drapeaux qui constituent un symbole national, régional ou idéologique (par exemple drapeau d'un pays, d'une région, drapeau rouge, drapeau noir).

Toutefois, l'expérience du 1er tour a montré qu'une telle appréciation au cas par cas n'était pas satisfaisante, notamment au regard du principe d'égalité. De la même manière, et au-delà d'une indispensable sécurité juridique, il convenait d'offrir à chaque candidat la plus grande assurance possible que son produit fini recevait bien l'accord du CSA et non pas de le laisser dans l'expectative de la suppression d'images au montage final, laquelle ne pouvait qu'être mal perçue. Pour ce faire, des règles claires et non sujettes à hésitation devaient être établies.

Le CSA a donc souhaité mieux proportionner l'interdiction aux objectifs qu'elle poursuivait, à savoir, empêcher toute appropriation de symboles officiels par un candidat et permettre l'application du principe de neutralité de l'Etat à l'égard des candidats, corollaire du principe d'égalité. En conséquence, le CSA a proposé, pour la décision en vue du second tour de scrutin de l'élection présidentielle, de limiter la restriction aux drapeaux national, régional ou européen.

Il a soumis pour avis cette nouvelle rédaction à la Commission nationale de contrôle qui, dans un avis du 17 avril 2002, a souhaité restreindre davantage l'interdiction en la limitant à l'emblème national et à l'emblème européen. Dans son avis, la Commission nationale de contrôle précisait que : « Le droit électoral en effet prohibe sans aucun doute possible l'assimilation par un candidat de ses idées ou de son programme à ce qui peut symboliser la patrie, l'unité nationale et la France. On peut, par extension, dès lors que le drapeau européen fait l'objet de dispositions de droit communautaire applicables et qu'il est d'ailleurs utilisé de facto dans les représentations officielles d'Etats membres dont la France, étendre l'interdiction dont fait l'objet l'utilisation du drapeau national à l'emblème européen.

« Mais aucune disposition du droit positif ne fait interdiction à quiconque, même et surtout en période électorale, de faire utilisation d'autres drapeaux, y compris, quel que soit le sentiment qu'on peut éprouver à leur égard, de drapeaux, y compris régionaux ou plus exactement "provinciaux. Il serait regrettable que, à la faveur d'un avis ainsi rendu, s'ajoutent d'autres restrictions à la liberté d'expression que celles que le législateur ou, sur son habilitation, le pouvoir réglementaire ont expressément prévues. »

Pour le second tour de scrutin, seul fut donc interdit l'usage par le candidat, dans ses émissions de campagne officielle, de l'emblème national et de l'emblème européen.

2.2.3. Les autres éléments d'interprétation.

Au cours des contrôles auxquels il a procédé, le CSA a été amené à préciser que :

- une écharpe tricolore d'élu ne saurait être assimilée à un drapeau. Sa présence dans les émissions de la campagne officielle a donc été acceptée ;

- un candidat peut faire apparaître l'adresse de son parti politique au sein d'une émission ;

- un candidat peut, de la même manière, indiquer l'adresse de son site internet au sein d'une émission, même si une page de ce site contient une rubrique « appel de fonds » ;

- un candidat est libre de s'exprimer en francs. Il peut lui être proposé, non imposé, une précision en euros au sein du sous-titrage ;

- une image fixe apportée par un candidat n'est pas comptabilisée comme insert vidéographique (cf. note 48) . Une image fixe issue de l'insert et travaillée avec les moyens techniques mis à la disposition du candidat par le CSA pour en faire une image animée ne prend pas pour autant la qualité d'insert.

2.2.4. Le degré d'intervention du CSA sur le contenu des émissions et la saisine du MRAP.

Le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) s'est ému des émissions de campagne officielle de M. B. Mégret qui constituaient, selon lui, une propagande raciste. Le secrétaire général du MRAP, M. Mouloud Aounit, a demandé au Conseil supérieur de l'audiovisuel de prendre toute mesure pour arrêter la diffusion des émissions de campagne officielle du candidat du Mouvement national républicain.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rappelé, dans un communiqué du 16 avril 2002 (annexe 25) (cf. note 49) , que les émissions de la campagne électorale officielle sont constituées de temps d'antenne mis à la disposition de chaque candidat afin qu'il présente son programme, comme il le fait avec le matériel de propagande électorale financé par l'Etat (profession de foi, affiches).

Le conseil a précisé qu'il est tenu de respecter une attitude de stricte neutralité à l'égard du contenu des émissions de la campagne officielle pour l'élection présidentielle. Il doit s'en tenir à la vérification de l'application de sa décision et s'interdit tout jugement de valeur. En tout état de cause, le juge judiciaire, compétent pour se prononcer sur ce type de question, a été saisi par les plaignants.

Les deux conseillers chargés du pluralisme ont reçu, le 18 avril 2002, une délégation du MRAP.


3° La diffusion des émissions de la campagne officielle


La diffusion des émissions de la campagne officielle radiotélévisée en vue de l'élection présidentielle s'est déroulée dans de bonnes conditions et très peu d'incidents de diffusion ont été à déplorer.

Le contrôle de la diffusion a relevé 7 incidents pour les deux tours de scrutin (cf. note 50) . Aucun d'entre eux n'était suffisamment déterminant pour qu'une rediffusion des émissions dont la diffusion avait pu être affectée de façon mineure soit justifiée.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a également été informé d'un incident, le 9 avril 2002 à 13 h 30, affectant la programmation des émissions de la campagne officielle radiotélévisée en vue du premier tour de scrutin de l'élection du Président de la République, sur les antennes de RFO Martinique. Les émissions de « grand format » ont été diffusées en lieu et place des émissions de « petit format ».

Il a adressé un courrier au président de RFO, le 11 avril 2002, afin d'appeler son attention sur la nécessité d'une vigilance toute particulière sur le contrôle de la programmation relative aux émissions de la campagne officielle radiotélévisée. Le CSA lui a demandé de prendre toutes les mesures utiles afin d'assurer le respect de la programmation établie par sa décision du 12 mars 2002.


4° Les résultats d'audience

des émissions de la campagne officielle radiotélévisée


Les 208 émissions des seize candidats à l'élection présidentielle diffusées sur France 2 et France 3 et les 144 émissions diffusées sur La Cinquième ont réuni en métropole un public cumulé d'environ 60 millions de téléspectateurs (cf. note 51) . La campagne officielle a également été diffusée sur France Inter, RFO et RFI.

Au premier tour de scrutin, les émissions de la campagne officielle diffusées sur France 2, France 3 et La Cinquième, programmées sur deux semaines, ont réuni en métropole un public cumulé d'environ 33 millions de téléspectateurs pour la première semaine et de 27 millions pour la seconde semaine.

Sur l'unique semaine de programmation du second tour, les émissions de la campagne officielle ont réuni un public nettement plus important de 48 millions de téléspectateurs. La durée de programmation quotidienne de ces émissions avec deux candidats, très inférieure à celle du premier tour avec 16 candidats, explique en partie ce gain. Mais surtout, cette audience accrue témoigne de l'intérêt beaucoup plus soutenu porté par les Français à cette phase de la campagne électorale (annexe 26).


5° Le coût des émissions de la campagne officielle radiotélévisée


Le financement des émissions de la campagne officielle radiotélévisée est à la charge de l'Etat (cf. note 52) .

Pour la première fois dans l'histoire des campagnes audiovisuelles officielles, le CSA a mis en concurrence plusieurs opérateurs pour assurer la production des émissions (cf. supra). On peut raisonnablement estimer que cette pratique nouvelle a entraîné une forte diminution des budgets par rapport aux campagnes antérieures, d'autant que les deux campagnes (présidentielle et législatives) se succédaient immédiatement, en mobilisant les mêmes moyens humains et matériels.

Le coût total de la campagne de l'élection présidentielle a été inférieur à 4 millions d'euros (TTC). Ce chiffre inclut, en 2002 comme pour les élections antérieures, toutes les dépenses de production, de coordination et de diffusion à la charge de l'Etat.

Le coût de la seule production des émissions s'élève à 2,7 millions d'euros (HT), soit 18 millions de francs (HT), au lieu des 34,4 millions de francs (HT) pour des élections précédentes (d'une part présidentielle de 1995 ; d'autre part législatives de 1997). C'est une baisse de 47,6 % par rapport aux sommes dépensées il y a sept ans pour la production des émissions de la campagne officielle radiotélévisée en vue de l'élection présidentielle.


PROPOSITIONS


L'exercice par le CSA des deux missions que lui confie la loi du 30 septembre 1986 modifiée, respect du pluralisme et organisation des émissions de la campagne officielle radiotélévisée, en fait un des observateurs, voire des acteurs, importants des périodes électorales. Cette situation particulière et son expérience lui permettent de formuler un certain nombre de propositions d'aménagements des textes qui organisent les campagnes électorales.

Il n'appartient évidemment pas au CSA de se substituer au Gouvernement et au législateur pour définir et formaliser des adaptations réglementaires ou législatives. Il a cependant paru important à l'instance de régulation de l'audiovisuel de ne pas se contenter de décrire les difficultés rencontrées au cours de l'élection présidentielle du printemps 2002, mais d'esquisser des pistes de réflexion opérationnelles, dont elle soumet l'intérêt et la faisabilité à l'examen des pouvoirs publics.


1° Les propositions du CSA

en matière de respect du pluralisme


1.1. Remédier à la difficulté de la détermination tardive des candidats.

La publication de la liste officielle des candidats quinze jours seulement avant le premier tour de scrutin, qui déclenche alors la période de campagne officielle, conduit mécaniquement à allonger la durée de la précampagne pendant laquelle les services audiovisuels rencontrent de grandes difficultés à déterminer à quels candidats potentiels ils doivent ouvrir leur antenne.

Afin de remédier à cette difficulté, le CSA propose qu'une réflexion soit conduite autour de deux orientations alternatives :

- soit, établir de façon plus précoce la liste officielle des candidats, ce qui serait de nature à favoriser le pluralisme et à circonscrire le débat entre ceux qui solliciteront effectivement les suffrages des électeurs (1.1.1) ;

- soit, clarifier, par des indices précis, la notion de « candidats présumés ou déclarés » (1.1.2).

1.1.1. Première option : avancer le délai de publication de la liste officielle des candidats.

En application de l'article 3 de la loi organique du 6 novembre 1962, la publication de la liste officielle des candidats intervient « quinze jours au moins avant le premier tour de scrutin ouvert pour l'élection du Président de la République ». Cette liste est, en général, publiée 16 jours avant le scrutin, soit 48 heures avant le début des émissions de la campagne officielle radiotélévisée.

Cette publication tardive a des conséquences néfastes sur le débat public. En effet, particulièrement quand les candidats sont nombreux, comme cela fut le cas en 2002, il est difficile, pour les services audiovisuels dans un laps de temps aussi court, de faire connaître au public de manière approfondie leurs programmes et encore plus d'organiser des débats entre eux ou entre leurs soutiens, dans le strict respect du principe d'égalité.

En fait, cette liste officielle des candidats pourrait être rendue publique plus en amont de la date du premier tour de scrutin, six semaines voire deux mois avant celui-ci. La durée de la campagne officielle en serait alors allongée d'autant, ce qui contribuerait à améliorer l'information des citoyens sur les enjeux réels du scrutin. Pendant cette période, les services audiovisuels ne seraient tenus d'ouvrir leur antenne qu'aux seuls candidats et n'auraient pas à devoir prendre en compte des candidatures incertaines, voire peu sérieuses, comme c'est le cas pendant la précampagne.

Une publication plus en amont de la liste officielle des candidats permettrait également de mieux organiser les émissions de la campagne officielle (cf. infra).

Cependant, en cas de vacance inopinée, la Constitution prévoit que l'élection a lieu vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus après l'ouverture de la vacance, un tel délai ne permettrait donc pas d'avancer la date limite de dépôt des candidatures, sauf à laisser trop peu de temps aux candidats pour réunir le nombre de signatures requises. Le régime actuel serait donc maintenu.

Cette première option nécessiterait la modification du décret du 8 mars 2001. Si une telle orientation n'apparaissait pas souhaitable, une autre voie pourrait être étudiée.

1.1.2. Deuxième option : conforter la présomption de candidature avant la publication officielle de la liste des candidats par le Conseil constitutionnel.

Il pourrait être envisagé de préciser plus en amont la présomption de candidatures donnant un accès aux médias audiovisuels.

Actuellement, le CSA demande aux services audiovisuels de se référer aux notions de « candidats déclarés ou présumés », faute d'indicateur plus précis, tant que la liste officielle n'est pas publiée. Ces imprécisions favorisent les faux-semblants, c'est-à-dire les cas de personnes exigeant un accès aux médias au nom d'une candidature affichée, alors qu'elles n'ont ni les moyens, ni parfois même l'intention, de recueillir les parrainages nécessaires à cet effet.

Pour éviter que l'esprit des textes soit ainsi contourné, il serait utile de pouvoir exiger que soient présentés, en amont de l'officialisation des candidatures définitives, des indices précis confortant le sérieux des candidatures proclamées.

Le juge des référés du Conseil d'Etat a exploré cette voie par sa décision du 7 mars 2002 rendue sur la requête de M. Larrouturou (requête no 243 833). Celui-ci, affirmant avoir l'intention d'être candidat à l'élection présidentielle, se plaignait de n'avoir disposé que d'un temps d'antenne très inférieur à celui d'autres candidats. Le juge des référés a justifié le rejet de sa requête par le fait que l'intention de M. Larrouturou n'était « assortie de justifications ni même d'indications précises sur la possibilité qu'il aurait de satisfaire aux conditions posées par le deuxième alinéa du I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 ». Ainsi, faute de présenter de telles justifications sur le nombre de parrainages obtenus, le requérant ne pouvait se plaindre d'une atteinte au pluralisme.

Poursuivre dans cette voie aurait le mérite d'éviter que le CSA demande aux médias audiovisuels de rendre compte de candidatures qui pourraient se révéler très incertaines ou présentées par des personnes dont on découvre plus tard qu'elles n'avaient aucune intention effective de participer au scrutin. Elle peut sembler contrarier les stratégies propres à certains candidats, comme ce fut le cas en 1988 pour M. Mitterrand et en 2002 pour M. Chirac puis M. Jospin - qui choisirent de ne dévoiler leurs intentions que tardivement, voire très tardivement. Ce cas est cependant assez bien circonscrit par la notion de candidature « présumée », entendue comme attachée à une personne qui « concentre autour d'elle des soutiens à sa candidature ».

Il n'appartient pas au CSA de définir d'éventuelles réformes des conditions de présentation des candidatures, dont certaines sont évoquées ça ou là (augmentation du nombre des parrainages, remplacement ou accompagnement des parrainages d'élus par des parrainages de citoyens, etc.). Mais, on pourrait par exemple imaginer que, un mois ou deux avant l'officialisation des candidatures, les candidats présumés soient tenus d'apporter une preuve du sérieux de leur démarche, soit en présentant des attestations établissant qu'ils disposent bien d'un minimum de promesses de parrainages (100 par exemple, si le nombre de signatures exigées restait toujours de 500), soit même en déposant au Conseil constitutionnel un premier lot de signatures. Les candidats présumés qui se montreraient dans l'impossibilité d'apporter de tels éléments, ou qui ne souhaiteraient pas le faire parce qu'ils choisiraient d'entrer tardivement en campagne, ne pourraient dès lors plus exiger une exposition audiovisuelle qui ne serait pas justifiée par des éléments prouvant le sérieux de leur intention et de leur démarche.

La décantation entre les candidatures sérieuses et celles qui le sont moins, que l'on pourrait attendre de l'introduction d'un tel dispositif, pourrait avoir notamment pour effet d'assurer aux premières un temps d'exposition plus important, les médias audiovisuels ne pouvant plus arguer ni des incertitudes de l'offre politique, ni de l'inflation de candidats présumés, pour ne suivre la précampagne qu'a minima. Les modalités de mise en oeuvre d'une telle solution devront veiller à éviter les éventuelles sources de contentieux. En tout état de cause, cette solution implique que le processus de lancement des parrainages soit avancé d'autant.

1.2. Moduler l'application du principe d'égalité pour la période de la campagne officielle.

Les textes réglementaires posant le principe d'une stricte égalité entre les candidats, le conseil a naturellement pour obligation de faire respecter cette exigence.

Cependant, si l'application stricte de cette règle se justifie s'agissant des temps de parole - c'est-à-dire de l'expression personnelle et directe des candidats et de leurs soutiens - l'expérience montre qu'elle est plus discutable pour ce qui est des temps d'antenne - lesquels ajoutent aux temps de parole tous les temps de reportage, de présentation ou de commentaire consacrés par les rédactions à ces candidats et à leurs soutiens. Est-il légitime qu'un même temps d'antenne soit accordé à un candidat qui nourrit chaque jour l'actualité électorale et à un autre qui ne multiplie, ni les manifestations, ni les propositions ? N'est-ce pas restreindre à l'excès la liberté éditoriale des rédactions que de leur imposer de suivre avec le même temps d'antenne un candidat « de témoignage » et un prétendant possible au mandat de Président de la République - avec pour effet automatique de réduire le temps consacré à ce dernier, faute de pouvoir rallonger celui consacré au premier ?

Il est donc souhaitable que, dès lors que le principe d'égalité serait maintenu pour la mesure des temps de parole, le CSA puisse faire prévaloir, pour l'évaluation des temps d'antenne, le seul principe d'équité, ce qui lui paraît plus réaliste et plus conforme à la liberté éditoriale des rédactions.

En tout état de cause, une telle distinction devrait s'imposer si la date de publication de la liste des candidats intervenait de façon plus précoce.

1.3. Faciliter l'application effective des dispositions prohibant la publication anticipée des résultats.

Comme il a été exposé précédemment, les dispositions de l'article L. 52-2 du code électoral interdisant de communiquer les résultats du vote avant la fermeture des bureaux métropolitains ont été contournées au premier tour de l'élection présidentielle, par des indications allusives ou explicites entre 19 heures et 20 heures sur de nombreuses chaînes de radio et de télévision sur l'identité du candidat arrivé en deuxième position, et par la diffusion, dans certains départements d'outre-mer, des résultats métropolitains plusieurs heures avant que le vote n'y soit clos.

Le conseil a réagi à ces violations du droit électoral en adressant deux mises en demeure et plusieurs mises en garde aux opérateurs concernés. Ainsi, le manquement ne s'est pas renouvelé lors du second tour de l'élection présidentielle et du scrutin législatif. Il estime toutefois que, pour l'avenir, compte tenu de la multiplication des sources d'information et de diffusion (satellite, internet, téléphonie), il sera illusoire, sans modification de la loi, de prétendre faire respecter le secret des résultats jusqu'à la clôture du dernier bureau de vote métropolitain.

Le CSA serait donc favorable à deux modifications de la loi électorale :

- organiser le vote dans tous les DOM et les TOM avant la métropole. Du fait des décalages horaires, le scrutin est déjà clos à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie, à la Réunion et à Mayotte lorsque sont connus les premiers résultats de métropole. En revanche, le scrutin est encore ouvert en Guyane, à Saint-Pierre-et-Miquelon, aux Antilles et ouvre à peine en Polynésie lorsque sont connus les résultats de métropole. Il faudrait donc que le scrutin soit organisé le samedi dans les territoires situés à l'ouest de la métropole, comme c'est déjà le cas pour les élections législatives en Polynésie. La compatibilité d'une telle modification avec l'article 7 de la Constitution qui prévoit que le scrutin a lieu le dimanche devrait être examinée. Par ailleurs, les dispositions réglementaires du code électoral relatives aux conditions de dépouillement devraient également être aménagées.

- harmoniser l'heure de fermeture des bureaux de vote sur le territoire métropolitain, comme il est déjà pratiqué pour les élections européennes, afin d'empêcher toute divulgation prématurée de résultats. Une telle modification est de nature réglementaire.

1.4. Préciser l'application de l'article L. 52-2 du code électoral.

Comme il a été exposé précédemment, l'article L. 52-2, en vertu de ses termes mêmes, est applicable dans chaque DOM jusqu'à la fermeture du dernier bureau de vote de ce DOM. En revanche, l'article L. 52-2 ne dit rien sur les autres collectivités territoriales d'outre-mer.

L'incertitude qui subsiste quant à l'application de l'article L. 52-2 du code électoral dans les autres collectivités territoriales d'outre-mer devrait être levée.


2° Les propositions du CSA

en matière de campagne officielle radiotélévisée


Les émissions de la campagne officielle radiotélévisée assurent à chaque candidat un temps d'antenne, égal et gratuit, sur les sociétés publiques de radio et de télévision. Une telle possibilité d'expression ne saurait être remise en cause sans une analyse approfondie de ses avantages et inconvénients. Cependant, les textes qui encadrent ces interventions télévisuelles et radiophoniques pourraient être revus afin, notamment, de prendre en compte la réalité et les contraintes du genre télévisuel. Il convient de rappeler que le souci d'amélioration du système des campagnes officielles, régulièrement décrié, n'est pas nouveau.

A l'occasion des élections législatives de 1993, le CSA a en effet procédé à une adaptation des émissions de la campagne officielle radiotélévisée. Cette réforme, entreprise après consultation de l'ensemble des formations politiques et du Gouvernement, s'avérait nécessaire compte tenu notamment des changements intervenus dans le paysage audiovisuel français. Ces émissions n'étaient plus, comme dans le cadre du monopole du service public de la radiodiffusion, la tribune privilégiée de l'expression des personnalités politiques lors d'une campagne électorale.

Le CSA avait donc modernisé ces émissions afin de valoriser ce moyen de campagne officielle. A l'intérieur du cadre légal existant, il avait aménagé du mieux possible les conditions de production et de programmation des émissions, dans l'espoir de susciter un nouvel intérêt des tétéspectateurs. C'est dans cette perspective qu'il a accru les instruments de production, diversifié les formats des émissions et amélioré leurs horaires de programmation.

Près de dix ans après la réforme de 1993, le bilan peut être fait d'un système efficace, répondant au souci d'une stricte égalité devant les moyens mis à disposition, mais également lourd.

Le système est aussi critiqué, notamment par les grands partis politiques.

En octobre 2001 et dans la perspective des échéances électorales majeures du printemps 2002, le CSA a souhaité mener une réflexion sur une réforme en profondeur du système.

Vers une réforme en profondeur de l'organisation de la campagne officielle radiotélévisée.

Le CSA a envisagé une réforme profonde des conditions de production des campagnes officielles radiotélévisées, réforme qui n'a pu être mise en oeuvre à l'occasion des deux élections du printemps 2002.

La réforme envisagée par le CSA.

Le point de départ de l'analyse du conseil est que le système traditionnel de production, s'il présente des avantages réels, est marqué par des contraintes très lourdes. Au titre des avantages : une égalité de moyens assurée aux candidats et partis (à l'exception des « inserts vidéographiques » qu'ils peuvent réaliser à leurs frais) ; des conditions de production et de réalisation relativement simples à mettre en oeuvre dans des délais très courts.

Au titre des contraintes, en dehors de celles qui tiennent au contenu même des émissions, on soulignera : un calendrier tardif, qui oblige à mobiliser les leaders politiques à un moment où ils sont particulièrement moins disponibles puisque les tournages - hormis les inserts - commencent pratiquement la veille de leur diffusion ; des conditions d'enregistrement et de montage très codifiées avec des durées limitativement définies ; des équipes techniques qui - à l'exception notable des réalisateurs - ne sont pas choisies par les candidats ou partis et par leurs équipes de communication.

Constatant que les émissions ainsi produites ne sont pas toujours utilisées au maximum de leur potentiel par ceux qui en bénéficient, qu'elles subissent une certaine désaffection du public et qu'elles sont volontiers l'objet de critiques sévères dans la presse et dans les milieux politiques, le conseil a souhaité revitaliser ces messages. Il a pour cela imaginé une réforme profonde des conditions de leur production qui, tout en assurant une stricte égalité de traitement entre candidats ou partis, accroîtrait radicalement leur implication dans leur réalisation.

Cette réforme aurait consisté à ce que les candidats - pour l'élection présidentielle - ou les partis - pour les élections législatives et européennes - choisissent désormais librement leur équipe de production et réalisent avec elle l'intégralité de leurs messages, dans un cadre minimum prédéfini par le CSA (règles à respecter en matière de contenu, de format des émissions et de date de leur remise). Il n'y aurait plus de lieu, de date ni de durée imposés pour les tournages, mais seulement une date impérative de remise des émissions. Cela implique notamment que les partis et candidats pourraient, à leurs risques et périls, entreprendre des tournages très en amont de la date de démarrage de la campagne officielle.

L'Etat aurait pris en charge financièrement ces messages, remboursés au terme de la campagne, dans la limite d'un plafond fixé à l'avance par la loi et dont le dépassement ne serait pas autorisé.

Le CSA, dégagé de son rôle traditionnel de « producteur », garderait sa mission de contrôle en visionnant les émissions et en assurant leur diffusion. La vérification des dépenses avant leur remboursement se ferait dans les mêmes conditions que pour les comptes de campagne.

Ce nouveau dispositif conduirait à généraliser le système actuel des « inserts ». En effet, pour chaque élection donnant lieu à l'organisation d'une campagne officielle radiotélévisée, les candidats ou partis peuvent réaliser aux frais des organisations politiques des documents vidéographiques ou sonores qu'ils insèrent dans leurs émissions télévisées. Ces derniers peuvent occuper jusqu'à 50 % de la durée de chaque émission. En tout état de cause, les candidats ont l'obligation d'introduire les sommes qui correspondent à la réalisation de cet insert, dans leur compte de campagne, celui-ci comportant un plafond.

Le CSA souhaitait donc systématiser cette pratique en l'inscrivant dans un cadre financier égalitaire. Cela impliquait de vérifier au préalable, d'une part, si une telle réforme pouvait entraîner un certain consensus auprès des responsables politiques et, d'autre part, si elle était juridiquement faisable à droit constant.

Les réactions des partis politiques.

Le CSA a donc consulté, au cours de deux réunions qui se sont tenues à son siège les 28 septembre et 3 octobre 2001, les différentes formations politiques sur son projet de réforme, en leur présentant les orientations nouvelles qu'il envisageait de mettre en place.

En règle générale, le renforcement de la liberté et de la souplesse offerts par ces propositions ont rencontré un écho favorable, notamment de la part de partis ayant une forte expérience des campagnes officielles et soucieux d'en voir réduire les contraintes. Les représentants de certains mouvements politiques disposant de faibles moyens se sont, en revanche, inquiétés des nouvelles responsabilités que cette réforme les conduirait à assumer : la perspective de devoir sélectionner une équipe de production et de travailler en direct avec elle leur apparaissait peu sécurisante. Certains souhaitaient garder la possibilité de choisir entre deux formules : celle, traditionnelle, de la mise à disposition par le CSA de moyens matériels et humains, et celle, nouvelle, qui leur était proposée, qui accroissait à la fois leur liberté et leur responsabilité. Mais c'est surtout la question des moyens financiers qui a fait l'objet des plus fortes interrogations, dans des sens d'ailleurs parfois divergents selon les formations sollicitées.

En effet, l'une des clés de voûte de cette réforme - la fixation d'un plafond de dépenses de la campagne audiovisuelle, égal pour tous - a été discutée à la fois par tel parti qui estimait qu'un plafond « audiovisuel » ne se justifie pas, dès lors qu'existe un plafond général pour l'ensemble des dépenses de campagnes, et par nombre d'autres partis qui, tout en insistant sur la nécessité absolue d'un plafond « audiovisuel » spécifique, craignaient qu'il ne soit qu'imparfaitement contrôlé et que, par conséquent, certains disposent de fait de moyens plus élevés que d'autres. Par ailleurs, des petites formations ont posé la question de l'avance des frais. Compte tenu de leur fragilité financière, de leur difficulté à obtenir des prêts bancaires et des pratiques professionnelles dans le secteur de l'audiovisuel où le paiement d'avance est la règle, faire une avance à la société de production qu'elles auraient choisie et la faire patienter jusqu'à un règlement par le ministère de l'intérieur, après la date du scrutin, semblait en effet constituer un problème aux yeux de ces formations. Elles souhaitaient donc que les pouvoirs publics résolvent au préalable la question de l'avance des fonds.

La faisabilité juridique.

Par un courrier du 26 octobre 2001, le CSA a interrogé le Conseil constitutionnel sur la validité juridique des nouvelle orientations envisagées. La question du CSA portait notamment sur la compétence qu'il tiendrait de l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 pour mener, à droit constant, une telle réforme, et notamment pour fixer un plafond financier. Le CSA voulait s'assurer que l'article 16 constituait une base suffisamment solide pour mener à bien cette réforme.

Dans sa réponse du 15 novembre 2001, le Conseil constitutionnel a invité le Conseil supérieur de l'audiovisuel à la prudence et notamment à bien mesurer les risques contentieux face à l'adoption de règles nouvelles en l'absence de textes les prévoyant expressément et à l'exigence d'égalité de traitement. Le Conseil constitutionnel a rappelé qu'en application de ce principe, il importe que tous les candidats aient accès, de la part de l'Etat, aux mêmes facilités, que celles-ci prennent la forme de prestations en nature ou d'un remboursement des dépenses de production.

Tirant la conséquence des réserves du Conseil constitutionnel et des réticences de certaines formations politiques, le CSA a décidé, dans sa réunion du 20 novembre 2001, de renoncer, dans l'immédiat, au projet de réforme qu'il envisageait de mener dans la perspective de l'élection présidentielle et des élections législatives. Les contraintes du calendrier empêchaient en effet la modification des différents textes législatifs concernés (cf. note 53) qui aurait donné au CSA une base légale solide pour mener une réforme en profondeur des conditions de production des émissions.

Après avoir mené à bien l'élection présidentielle et les élections législatives du printemps 2002, le CSA souhaite reprendre la réflexion entamée à l'automne précédent.

A cet égard, il souhaite présenter deux formules. L'une, radicale, consiste à obtenir du législateur les moyens de mettre en place un système permettant aux candidats de choisir librement leurs équipes et de réaliser avec elles l'intégralité de leur message. L'autre, subsidiaire, consisterait, à l'intérieur du cadre légal existant, à alléger à nouveau les contraintes de production.

2.1. Les moyens pour réaliser une réforme en profondeur du système.

La réforme consisterait à ce que les candidats ou les partis, selon les élections, aient une liberté totale s'agissant des moyens de production. Ils choisiraient ainsi leur équipe et réaliseraient avec elle l'intégralité de leurs messages, dans un cadre minimum prédéfini par le CSA (règles à respecter en matière de contenu, de format des émissions et de date de leur remise). Il n'y aurait plus de lieu, de date ni de durée imposés pour les tournages, mais seulement une date impérative de remise des émissions.

Préalablement à la mise en place de ce nouveau système, plusieurs points doivent cependant être clarifiés :

- s'agissant d'une campagne officielle, le principe d'égalité des moyens entre chaque candidat impose-t-il de prévoir un compte de campagne spécifique ?

- si oui, un plafond de dépenses audiovisuelles, c'est-à-dire le budget dont disposerait chaque candidat ou parti pour réaliser ses émissions de campagne officielle, doit pouvoir être fixé pour chacune des élections ;

- si non, une simple insertion dans le compte de campagne général est-elle suffisante dans le cadre de l'élection présidentielle ? Un dispositif particulier doit-il être prévu s'agissant des élections législatives ? La question du dépassement des moyens offerts par l'Etat (remboursement des dépenses) doit être réglée ;

- des mesures doivent nécessairement être prises de manière à vérifier la sincérité des coûts de production appelés à rester à la charge des intéressés ;

- la mise en place d'un système de « secours », sur le modèle de l'organisation actuelle des campagnes, est-elle opportune et nécessaire, notamment pour les candidats ou partis dont les moyens sont moindres ?

Le CSA demande au législateur de lui donner les moyens de mener à bien cette réforme qu'il appelle de ses voeux.

Si une telle refonte en profondeur du dispositif ne pouvait être menée à bien, une autre voie pourrait consister pour le CSA à améliorer, à nouveau, le dispositif existant.

2.2. L'amélioration du système actuel.

L'utilisation par les candidats des moyens que le CSA met à leur disposition leur donne déjà une très grande liberté de travail qu'ils méconnaissent souvent (compte tenu en particulier du bref délai qui s'écoule entre l'officialisation des candidatures et le vote lui-même). Il serait possible d'aller plus loin dans la voie des tournages hors des studios du CSA qui favorisent souvent la créativité et la diversité, ainsi qu'il a pu être constaté lors des élections de 2002. Deux modalités alternatives sont ici proposées :

- la première consisterait simplement à maintenir le cadre actuel en accroissant fortement la durée des tournages dans les lieux choisis par le candidat et en limitant les tournages dans les studios fournis par le CSA à une part résiduelle ;

- la seconde consisterait à supprimer les enregistrements dans les studios fournis par le CSA et donc à systématiser les tournages dans les lieux choisis par le candidat. Dans ce cas, une même équipe technique (éclairagiste, script, cadreur, maquilleur, etc.) serait mise à la disposition du candidat pendant la durée de la campagne officielle radiotélévisée et effectuerait les tournages, pour la totalité des émissions, dans les lieux choisis par le candidat. Cette option présente l'avantage d'être garante de l'égalité de traitement entre les candidats que le CSA a pour mission d'assurer. En revanche, cette formule permettrait difficilement à des candidats de tourner en amont de l'officialisation de leur candidature, puisque aucune équipe technique ne pourrait leur être affectée avant cette date. C'est une différence notable avec la réforme en profondeur, dans laquelle un candidat présumé peut, à ses risques et périls, commencer ses tournages avant même d'avoir la confirmation officielle de sa participation à l'élection.

Au-delà de cette réforme de l'organisation des émissions de la campagne officielle radiotélévisée et des modifications législatives qu'elle implique, diverses réflexions ont déjà été menées sur l'inadaptation de certains aspects de la réglementation électorale et des propositions de modifications ont déjà été formulées. Peu de suites juridiques ont toutefois été données à ces nombreuses initiatives. On relèvera cependant qu'un des souhaits du CSA, relatif à la réduction du volume des émissions de la campagne officielle accordé à chaque candidat, a été suivi d'effet (décret du 8 mars 2001) et le CSA s'en félicite (cf. supra).

D'autres propositions formulées dans le rapport relatif à la campagne en vue de l'élection du Président de la République de 1995 n'ont en revanche pas reçu de suites favorables. On rappellera notamment la demande qui concerne les délais de publication de la liste des candidats.

2.3. Avancer la date de publication de la liste officielle des candidats.

Une connaissance plus en amont de la liste des candidats présenterait un avantage, non seulement au regard du respect du pluralisme (cf. supra) mais encore sur celui de l'organisation de la campagne officielle radiotélévisée.

L'actuelle publication tardive complique l'organisation et la programmation des émissions de la campagne audiovisuelle officielle : d'une part, le processus de consultation et de dialogue avec les représentants des candidats s'en trouve écourté, ce qui est nuisible à la qualité même de la campagne, d'autre part, les candidats se trouvent obligés d'enregistrer leurs messages pendant une durée brève, à une période où ils manquent souvent de disponibilité et sont placés sous une pression peu favorable.

La connaissance tardive des informations nécessaires à l'élaboration de la grille de programmation des émissions de la campagne officielle est source de difficultés, tant pour le CSA dans la mise en place des moyens de production nécessaires, que pour les bénéficiaires quant à la préparation de leurs interventions. La durée et le nombre d'émissions à programmer varient sensiblement selon le nombre de candidats. Or, il n'est actuellement pas possible de concevoir la grille de programmation en fonction du nombre de candidats, car cette donnée est connue trop tardivement. Le CSA doit donc se fonder sur de pures hypothèses de travail.

Une connaissance en amont de la liste des candidats permettrait au CSA d'engager le processus de dialogue et de concertation dans des conditions parfaites d'égalité de traitement.

Cette disposition ne serait applicable que dans le cas d'une élection présidentielle ayant lieu au terme normal du mandat du président en exercice.


A N N E X E S

Liste des annexes


Annexe 1 : article 16 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

Annexe 2 : décret no 2001-213 du 8 mars 2001 portant application de la loi no 62-1299 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel.

Annexe 3 : recommandation du CSA du 23 octobre 2001 à l'ensemble des services de radio et de télévision en vue de l'élection présidentielle.

Annexe 4 : communiqué no 475 du 7 février 2002.

Annexe 5 : communiqué no 477 du 5 mars 2002.

Annexe 6 : communiqué no 478 du 19 mars 2002.

Annexe 7 : communiqué no 479 du 26 mars 2002.

Annexe 8 : communiqué no 481 du 5 avril 2002.

Annexe 9 : tableaux récapitulant les temps de parole accordés aux candidats pendant les précampagnes et les campagnes officielles de 1995 et 2002.

Annexe 10 : communiqué no 485 du 23 avril 2002.

Annexe 11 : communiqué no 487 du 26 avril 2002.

Annexe 12 : communiqué no 489 du 2 mai 2002.

Annexe 13 : communiqué no 488 du 30 avril 2002.

Annexe 14 : communiqué no 490 du 14 mai 2002.

Annexe 15 : courrier du CSA du 16 avril 2002 à l'ensemble des diffuseurs relatif à l'application des articles L. 49 et L. 52-2 du code électoral.

Annexe 16 : mise en demeure du 30 avril 2002 du CSA à Antilles Télévision.

Annexe 17 : mise en demeure du 30 avril 2002 du CSA à Antenne Créole Guyane.

Annexe 18 : recommandation no 2002-5 du 30 avril 2002 du CSA à l'ensemble des services de télévision et de radio.

Annexe 19 : décision no 2002-201 du 5 avril 2002 fixant la durée des émissions relatives à la campagne officielle pour chaque candidat en vue du premier tour de scrutin de l'élection du Président de la République et portant répartition de cette durée en nombre et durée d'émissions.

Annexe 20 : décision no 2002-229 du 26 avril 2002 fixant la durée des émissions relatives à la campagne officielle pour chaque candidat en vue du second tour de scrutin de l'élection du Président de la République et portant répartition de cette durée en nombre et durée d'émissions et fixant les horaires de programmation de ces émissions sur les antennes des sociétés France 2, France 3, La Cinquième, Radio France (France Inter), RFO et RFI.

Annexe 21 : décision no 2002-202 du 5 avril 2002 fixant les dates et ordre de passage des émissions de la campagne officielle radiotélévisée sur les antennes des sociétés nationales de programme France 2, France 3, La Cinquième, Radio France (France Inter), RFO et RFI en vue du premier tour de scrutin de l'élection du Président de la République.

Annexe 22 : décision no 2002-230 du 26 avril 2002 fixant les dates et ordre de passage des émissions de la campagne officielle radiotélévisée sur les antennes des sociétés nationales de programme France 2, France 3, La Cinquième, Radio France (France Inter), RFO et RFI en vue du second tour de scrutin de l'élection du Président de la République.

Annexe 23 : décision no 2002-110 du 12 mars 2002 relative aux conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne officielle en vue de l'élection du Président de la République pour le premier tour de scrutin, le 21 avril 2002.

Annexe 24 : décision no 2002-228 du 23 avril 2002 relative aux conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne officielle en vue de l'élection du Président de la République pour le second tour de scrutin, le 5 mai 2002.

Annexe 25 : communiqué no 483 du 16 avril 2002.

Annexe 26 : audience des émissions de la campagne officielle.

Nota. - Les annexes sont disponibles sur le site web du CSA : www.csa.fr